Onze ans après 11/6 12/10, que peut-on encore attendre du septième album des deux allemands de Tarwater ? Certainement pas la révolution que l’intégration récente de l’écurie Morr Music ne promettait déjà pas. Sans être le groupe d’un seul album, Tarwater n’a pas vocation à changer son fusil d’épaule. Sa cible reste identique de disque en disque, tout juste le duo s’octroie t-il de temps à autre un changement de calibre sonore. Pour autant, l’obstination à creuser le même sillon n’en fait pas un groupe qui radote avant l’heure. Si à la surface leur musique n’admet aucun périlleux changements d’échelle, en profondeur quelques courants souterrains produisent régulièrement des remous, suffisamment en tous les cas pour entretenir notre intérêt depuis le début. Surtout, cette chair musicale qui faisait défaut par le passé dans certains de leurs albums et lors des prestations scéniques, parmi les plus soporifiques et désincarnées qui soient, semble à présent excéder le stade des velléités et s’incarner pleinement dans un format pop idoine, où l’aspect cérébral le dispute au plaisir immédiat. Peu sentimentaux, les deux berlinois en appellent toutefois aux sens. Un morceau comme “A Mariage In Belmont” attire l’oreille sans la draguer en se libérant du cadre par trop rigide d’une architecture harmonique droite dans ses bottes. En regardant de l’autre côté de l’Atlantique (l’Amérique est convoquée comme une source d’inspiration récurrente), Tarwater retrouve des couleurs (les motifs africains et orientaux se sont rarement fondus aussi bien aux sonorités électroniques et acoustiques), fait des clins d’oeil inquisiteurs (une reprise personnalisée des Virgin Prunes), sans oublier de glisser entre les lignes son ironie mordante, tissant sa toile de sons contrastés sans se prendre les pieds dedans.
– Le site de Tarwater.
– Le site de Morr Music.