Jack White et sa « grande soeur » Meg reviennent nous montrer de quoi ils sont capables. Protection acoustique recommandée.
Icky Thump est le sixième album des White Stripes, fait souvent ignoré par la majorité du public, celui-là même qui a appris à les connaître via le riff de “Seven Nation Army”, entendu dans un stade de foot quelque part en province. C’est bien dommage, car le début de leur carrière comprend quelques morceaux de bravoure, et c’est justement à leur souvenir que rappelle Icky Thump, l’album le plus bizarre du duo de Detroit. Et ça, c’est quand même quelque chose.
On connaît le morceau titre, et premier extrait : riffs de guitare sortis tout droit du garage de Jimmy Page en passant par la pédale de distorsion la plus pourrie depuis J Mascis, lignes de synthé qui ressemblent à une flûte traditionnelle irlandaise (ou quelque chose dans le genre) et des paroles ouvertement politiques «White American, nothing better to do?/Why don’t you kick yourself out, you’re an immigrant too»). Comme début d’album, on a connu nettement plus modeste, et moins efficace. Forcément, il ne nous prépare en rien à la suite. « You Don’t Know What Love Is » fait penser à leur fabuleux troisième album, White Blood Cells, alors que « 300 MPH Torrential Outpour Blues » est exactement ce que son titre évoque, la tempête en question provenant de la guitare d’un Jack White survolté.
Tout cela n’était pas encore assez bizarre, d’où la présence de « Conquest », sorte d’hymne de feria espagnole, duel entre la guitare de White et une trompette, qui a probablement évoqué des métaphores journalistiques de confrontation entre taureau et matador, comme évoqué par la pochette. Mais on préfèrera cette fois éviter les clichés. “Conquest” est complètement cinglé, mais on savait que Jack White l’était aussi, et pas un peu. La confirmation viendra plus tard, avec « Prickly Thorn But Sweetly Worn/Saint Andrew (This Battle Is In The Air) » (ouf), qui ressemble à une chanson traditionnelle anglo-saxonne, terminée par une Meg White sous amphés. On ne comprend rien, mais ce n’est clairement pas le but. “Rag And Bone” continue dans le style private joke/bizarre/est-ce une bonne idée : sous fond de guitare évidemment saturée et de batterie tout aussi évidemment simpliste, Jack et Meg prennent les rôles de vide-greniers, se promenant de porte en porte achetant n’importe quoi, «from Technics turntables to gramophones». Euh, oui, OK.
Ceci dit, c’est clairement le Jack White bruyant, sale, limite malsain qu’on préfère. « Bone Broke » voit sa voix, sa guitare et plus ou moins n’importe quoi d’autre passés sous un filtre téléphonique, évoquant en même temps Robert Johnson, Tony Iommi et Mo Tucker. « Little Cream Soda » et « Catch Hell Blues » sont deux des meilleurs morceaux ici, démontrant le talent de guitariste de White, absolument pas démonstratif, mais capable de sortir des riffs et licks complètement dingues, tandis que Meg défonce ses fûts comme si sa vie en dépendait. C’est vrai, ils ont toujours fait ça, mais personne ne le fait aussi bien. Heureusement, Jack White montre aussi ses capacités de songwriter, comme prouvé avec le superbe « I’m A Martyr For My Love For You », un des meilleurs moments de leur carrière.
D’ailleurs, Icky Thump en est un, des meilleurs moments de leur carrière, revenant à la source organique de leur duo guitare/batterie/claviers après les différentes expériences de Get Behind Me Satan. Il reste que Jack et Meg sont, comme d’habitude, coupables de leur talent débordant, ce qui fait qu’on retrouve un peu tout et n’importe quoi tout au long de l’album. Il n’empêche qu’il est peut-être, depuis White Blood Cells, le meilleur exemple de ce que sont les White Stripes.
– Le site de The White Stripes.
– La page Myspace du groupe.