Voilà bien un étrange objet que ce Iodine. Un accent à couper au couteau venu d’un coin reculé d’Ecosse (les îles Orkney en fait). Des arrangements folk ou traditionnels croisés avec une électro crasseuse et grimaçante. Deux voix rappelant tour à tour Sigur Ròs ou un Brian Molko pris aux bronches. Vraiment, Iodine ne ressemble pas à grand chose de palpable, et le duo Half Cousin semble débarquer d’une autre planète. On avait succombé aux charmes de la musique transbalkanique de Beirut, on écarquille les oreilles devant ces chansons sans origine identifiable, malgré la même curiosité pour des sonorités a priori incombinables. Est-ce de l’électro du grand large ? Est-ce du folk pétrolifère ? Est-ce de la house tectonique ? A la fin du disque on ne sait toujours pas ce qu’on a entendu, mais on sait que c’était drôlement chouette, bizarre mais chouette. Et ce petit goût de rusticité lié à ces «r» qui roulent sur les galets d’arrangements, tour à tour dépouillés et étouffés, octroient à Iodine un côté maladroit particulièrement séduisant. Si ce duo est un couple qui s’aime, il serait assez intéressant de découvrir leur chaumière, là-haut aux portes du Grand Froid : pour sûr nous y trouverions des guitares, mais aussi des instruments à vent fabriqués dans des écorces de chênes séculaires. Il se pourrait même que ces gentils illuminés aient pris pour argent comptant l’idée de créer le Gaffophone, cet instrument de tous les malheurs qui servit tant à Gaston Lagaffe d’exutoire dans ses grands moments de solitude. Iodine peut laisser perplexe, mais en aucun cas de marbre. Parce qu’on rigole, mais il en faut du courage pour se lancer dans une telle aventure, sans référent, sans atome crochu avec le plus excentrique de ses contemporains. Half Cousin est assurément un groupe de passionnés, et un groupe qui a des choses à dire. Même accompagnées d’une simple guitare soyeuse ou d’un accordéon, les quelques douces mélodies disséminées ici et là sont de petites gouttes d’eau increvables, capables de traverser les océans sans se diluer. Voilà donc un disque qui allie l’étrange au délice, l’inquiétude à la quiétude. Expérimental, mais avant tout sentimental.
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