De danse, il sera question, mais sans danseur. Danse concentrique en triangle de trois instruments (contrebasse/Stéphane Kerecki, saxopone(s)/Matthieu Donarier, batterie/Thomas Grimmonprez), tournée vers l’extérieur. Frisson du mouvement qui craint de défaire la beauté des lignes, de déplacer les perspectives, de rompre l’équilibre. Danse, parce qu’expression spontanée d’un corps collectif qui se meut dans l’espace à la recherche d’un point focal commun sans cesse remis en jeu. Danse, encore, là où les musiciens « s’approchent les uns des autres, vont et viennent sans ordre préétabli mais avec obstination dans le tour et le détour » (Georges Didi-Huberman, dont on ne saurait trop conseiller la lecture du Danseur des solitudes, admirable texte sur Israel Galván). Fort d’un premier album salué en 2004, Story Tellers, le trio de Stéphane Kerecki, musicien et compositeur au CV pour le moins intimidant (il côtoya notamment de près le regretté Jean-François Jenny-Clark), poursuit son pas de trois, tantôt exalté, tantôt songeur. Dans la lumière, Matthieu Donarier (Sacre Du Tympan, Gros Cube, Caratini Jazz Ensemble) brille encore une fois de mille feux sans s’agiter à perte pour qu’on l’entende. Humilité d’un musicien aux interventions aussi incisives que décisives, raucité d’un son dont l’épaisseur et l’étendue dénotent un champ d’action tout en plis et déplis, zones d’ombre et éclaircies radieuses. Précision, subtilité et sensibilité du toucher de Thomas Grimmonprez, capable d’allier douceur et violence, retenue et emportement en un même élan (“Focus Danse”). Les treize compositions de Stéphane Kerecki, leader sans suffisance, font la part belle à un groove mobile et souple, alternent fluidité mélodique et accélérations improvisées au cordeau. Bel art de respirer et de transpirer, savant dosage des forces, entente élémentaire entre trois musiciens à l’agilité étincelante.
– La page Myspace de Stéphane Kerecki.
– Le site de Zig-Zag Territoires.