Les chiots passent haut la main le cap du deuxième album. Encore un petit effort, et ils l’auront leur Kate Moss…


Venus de Perpignan, les HushPuppies s’étaient imposés assez facilement en 2005 avec The Trap, un premier album bourré jusqu’à la gueule d’hymnes garage euphorisants. Deux ans plus tard, et après une tournée internationale menée tambour battant, les HushPuppies livrent Silence Is Golden, un album qui ne tient pas plus en place. Et qui confirme tout le bien que l’on pensait d’eux.

Enregistré au mythique studio Blackbox d’Angers, Silence Is Golden est de ces disques qui collent aux semelles, dont on se sépare qu’à force de volonté et de contorsions dangereuses pour les lombes. Sous la houlette de Peter Deimel, un habitué du gros son qui tache intelligemment (dEUS, The Kills, Chokebore), les onze nouveaux titres du quintet catalan ont été captés en condition live. Et il en ressort que la formation garage rock a beaucoup appris et progressé pendant ces deux années. Plus ramassé que son prédécesseur, plus sombre aussi, cet opus est l’occasion pour les Hush de confirmer leur capacité incontestable à écrire des chansons habitées par la rage. Mais une rage positive, celle qui fait se serrer les dents et blanchir les poings. L’alternance entre brulôts destructeurs et titres plus enlevés est toujours de rigueur, la recette étant bonne, elle est renouvelée. Sauf que le grill a continué à chauffer pour atteindre sa température la plus élevée, et la hargne des ex-perpignanais a été saisie sur le vif, libérant son jus au premier jet. Le disque est une série de onze combustions instantanées, balancées sans se soucier des brûlures.

Ces fans transis d’Electrelane leur ont pompé un goût sans borne pour le son électrisant (et parfois éreintant, seul bémol à émettre ici) du farfisa. Ils en usent et abusent, en mettent partout, l’étalent, le jettent par terre, s’assoient dessus. Mais ce pauvre petit orgue n’est pas tout seul. La science des Hush pour les riffs de guitares destinés au saccage s’est considérablement étoffée depuis The Trap. Pas un seul titre sans disto, pas une seconde d’accalmie. Même quand ils lèvent le pied, c’est uniquement pendant un couplet joliment troussé immédiatement bousculé par un refrain coup de boule – “Moloko Sound Club”, “Down, Down, Down”, “Love Bandit”. Ce qui change aussi, c’est la rythmique. Un espace plus profond et plus ample est dédié à la section massive tenue par Guillaume Le Guen (basse) et Franck Pompidor (batterie). Du coup, leur rock garage gagne en efficacité et, il faut le dire, en maîtrise. Il n’est plus question de gamins frondeurs qui s’amusent avec les codes des classiques pour délivrer des petites bombes à déflagration. Ils évoluent maintenant dans la cour des grands en élevant leur niveau de jeu.

C’est qu’il en faut, de l’assurance, pour honorer les compositions d’Olivier Jourdan et ses copains. Hushpuppies, sur le plan de l’écriture strictement rock, est probablement une des meilleures choses qui soit arrivée en France ces derniers temps. Mélodies explosives, harmonies décomplexées, arrangements ambitieux. D’aucuns diront que la spontanéité du garage doit y perdre. Bien au contraire, la précision des compositions est un hommage permanent à une scène frontale qui a su évoluer depuis son apparition. Le garage est certes rentre dedans, et le repos en est banni. C’est justement une des grandes qualités des Hush, allier l’énergie irréfléchie du garage des origines à des références pop éclectiques et essentiellement anglosaxonnes (leur proximité géographique a fait d’eux des habitants permanents de Benicassim, dans le public), tout en gardant une fraîcheur et une impression d’immédiateté et d’urgence qui ne se dément jamais. On reste ébahi devant l’efficacité de certains morceaux, comme le tubesque premier single de ce nouvel effort, “Bad Taste And Gold On The Doors” et sa sentence «I want my Kate Moss everyday spread on my toast» en forme de leitmotiv moqueur et désabusé. On peut aussi citer la lente montée de “Lunatic’s Song”, qui commence comme une petite galipette pop et qui se voit assez rapidement assommée par un riff acide pour s’achever dans un déluge de guitares épileptiques. Même des vignettes plus classiques se voient assénées avec un enthousiasme increvable qui les rend incontournables – “Hot Shot”, “Fiction In The Facts”.

Incontestablement, les HushPuppies ont gagné en puissance et en assurance, sans lâcher la plus petite parcelle de terrain à la facilité et à la lourdeur. Souhaitons-leur que les palmes glanées avec The Trap soient démultipliées avec Silence Is Golden. Mais honnêtement, vu la qualité de ce disque, on voit mal comment il pourrait en être autrement.

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