Entre nulle part et ailleurs, c’est là que se cache Hobotalk. Pour toujours. Ou jamais.
Du fond de son Ecosse natale, grattant sa six-cordes, Marc Pilley observe d’un oeil goguenard ses congénères s’ébrouer, préférant la douce torpeur du folk à l’agitation du Monde. Bien sûr, guitares champêtres, cordes ouatées, piano bucolique, batterie timide et voix opalescente, tout ça on connaît. Rien de bien révolutionnaire chez Hobotalk. Pourtant, une fois encore le baume agit, la peau s’échauffe, le coeur décroche et les yeux s’éteignent.
«Give me a season without the grey […] give me day after night» susurre-t-il sur “Life Looks Better”, déclaration délicate qui résume finalement bien l’univers dans lequel vit Marc Pilley. Un monde irréel, sans prise sur le temps, sans attache à la Terre, et dans lequel il a construit une petite bicoque. Et nous y sommes les bienvenus, il est ravi de nous y accueillir en chansons. Ces mondes-là, faits de riens, on y avance timidement, un peu effrayé par tant de simplicité, tant de modestie. Car Marc Pilley est un artisan discret, préférant oeuvrer à l’élaboration de ses petites vignettes, penché sur son métier mais laissant la porte de l’atelier grande ouverte au voyageur égaré.
Oh, bien sûr, il faut effectuer le premier pas et aller à lui. L’homme n’est pas de ceux qui s’imposent, préférant livrer ses petites pièces au vent, les offrant à qui veut. Au départ, on le prend même pour un doux rêveur, un illuminé qui aurait appris à jouer de la guitare autour d’un feu de camp au cours d’une colonie adolescente, un folkeux de plus.
Pourtant, en tendant un tant soit peu l’oreille, et en ayant la politesse d’écouter ce qu’il nous dit, on se rend bien vite compte que sa poésie élégiaque est tout sauf insignifiante. Derrière un discours résolument optimiste, au pire légèrement inquiet, l’Ecossais pose des questions délicates, sur l’Homme et son besoin vital de courir sans être sûr de savoir pourquoi. Lui préfère regarder la nature par les yeux de sa mie, la seule à même de lui donner raison de se lever le matin. Et cet amour dans son plus simple appareil suffit à son bonheur. Car il s’agit bien de cela : que valent la vie, le monde moderne, la course contre le temps, la montre ou l’argent sans le regard d’un être que l’on aime et qui nous aime ? Naïf ? Peut-être, mais tellement réconfortant.
Il serait idiot de se priver du plaisir simple d’un fruit sucré, Homesick For Nowhere en est un panier plein. Et Marc Pilley un maraîcher pas vénal pour un sou. Ce peu de bonheur, il l’offre de bon coeur. Profitons-en, et croquons dedans avant qu’un ver ne s’y loge.
– Lire également la chronique de Notes On Sunset
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