Enregistré à l’initiative de Marisa Monte, jeune star montante improvisée productrice, Tudo Azul regroupe pléthore de chansons appartenant au répertoire de la Velha Guarda Da Portela (littéralement « la vielle garde de Portela »), un ensemble de musiciens issus de la plus prestigieuse école de samba de Rio créée en 1935. Pareil devoir de mémoire n’est pas sans générer son lot de réserves lorsque les raretés de l’ordre de l’anecdotique sont présentées comme d’inestimables trésors et le passé remis au goût du jour dans un bain de formol. Autant de dérives marquées au sceau de l’opportunisme commercial absentes de ce précieux Tudo Azul, annoncé un peu pompeusement comme une réponse brésilienne au Buena Vista Social Club mais ne souffrant d’aucune baisse de régime notable ou fausse note. A l’honneur, la samba carioca se décline à travers ses diverses formes originelles (canção, breque, de morro), chantée et jouée tantôt par des figures emblématiques du genre tels Casquinha, Argemiro, David de Pandeiro, tantôt par des héritiers de renom, Jacques Morelembaum, Moreno Veloso, Christina Buarque, Zeca Pagodinho, Paulinho da Viola et Marisa Monte elle-même, tous soucieux de préserver le patrimoine musical brésilien comme d’en perpétuer la modernité. La lettre et l’esprit de compositions pour la plupart jamais gravées sur disque perdurent ici dans un écrin classique et sobre, pour le moins propice à leur bonification. Une simple guitare acoustique associée à une voix suffisent ainsi à porter l’émotion à son comble, comme sur “Eu Te Quero”, une magnifique sambalero dans le plus pur style des années 50. Ailleurs, une section rythmique plus fournie et des choeurs dessinent des contours harmoniques raffinés tout en attestant du caractère éminemment dansant de la samba (“Você Me Abandonou”, « Sempre Teu Amor », « Voltei »). Plages après plages, cette musique populaire issue de la rue dévoile de multiples reliefs stylistiques et possibilités d’arrangements qui inspireront à la fois les grands maîtres de la bossa-nova et l’avant-garde du tropicalismo.
– Le site de Nocturne