Mud Flow, emmené par Vincent Liben, est sorti de l’ornière bruxelloise dans laquelle il vivotait par la grâce d’un troisième album racé et élégant, A Life On Standby (2005). Fort d’un succès commercial modeste mais suffisant pour prolonger l’aventure des grands chemins, le trio d’origine, devenu entre-temps quartet, livre ici son quatrième album, Ryunosuke — ainsi intitulé en hommage au poète japonais trash Ryunosuke Akigawa, qui se donna la mort en 1920 à l’âge de 35 ans. Superbement produit par le désormais incontournable (du moins pour qui veut percer outre-Quiévrain) Rudy Coclet, Ryunosuke creuse la même veine que son prédécesseur, cette pop sombre, millimétrée, parfaitement caractéristique de la scène belge actuelle. Liben n’ayant pas exactement profité de son succès sur un plan privé (si on en croit son dossier de presse), il a tiré de ses expériences un suc à même d’alimenter ses compositions. Ainsi, les guitares se veulent souvent ténébreuses sans jamais être agressives, les claviers recouvrent les mélodies d’un grand voile opaque et la basse assène méthodiquement sa massue, appuyée par une batterie aventureuse. Cependant, ce qui fit la force de A Life On Standby se transforme en épine dans le pied de Ryunosuke, la lente construction des morceaux : les chansons s’étirent en longueur quand elles n’atteignent carrément pas les sept minutes. Seule exception, le single enjoué “Monkey Doll” qui, il faut le dire, s’il est parfaitement réussi, enlevé, habillé d’une bien jolie mandoline, court et immédiatement accrocheur, demeure à l’opposé du reste de l’album, à tel point que ça frise le plan marketing. Du coup, il faut être honnête, les bonnes idées des premières mesures de la plupart des autres titres tournent en rond à plusieurs reprises pour finir par nous ennuyer. Excès de confiance ou de zèle, on ne sait pas, toujours est-il que ce maniérisme agace, d’autant qu’il ne sert pas forcément de grandes idées mélodiques mais plutôt une musique conventionnelle. Ryunosuke est donc un album banalement bien fait, un de plus. Dommage.
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