Nouveau groupe et vieille musique. Vraie bonne idée ou faux bon disque ? On vous laissera juger de la pertinence d’une option aussi radicalement ancrée dans le passé. Quoiqu’il en soit, les brooklynois ont bien potassé.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, on ne se lasse toujours pas du mirifique Never Seen The Light Of Day de Mando Diao. Alors forcément, quand un nouveau groupe réutilise la même recette, à savoir lier une sauce vintage outrageusement sucée depuis sa création — la sunshine pop version Beach Boys pour les Suédois versus la pop britannique made by The Beatles, The Kinks et autres Who chez Locksley — à des sons rock’n’roll customisés par de vrais petits génies — The Strokes et The Libertines –, on se prend à rêver d’un nouveau tour de force et d’un groupe à suivre de très près.
Il y a de l’idée dans Don’t Make Me Wait : belles mélodies, harmonies aériennes, rythmes effrénés et guitares scintillantes. On est même parfois surpris devant la qualité de certaines compositions. “She Does”, “All Over Again” ou “Why Can’t I Be You” possèdent cette énergie délicieusement rétrograde qui nous font regretter de n’avoir pu assister aux premiers incendies provoqués par les Beatles dans les clubs de Hambourg. Paroles légères sur guitares explosives, voix malmenées et batterie perforée. Globalement, Locksley mène bien sa barque dans son hommage permanent à la musique à papa, usant et abusant de tous les gimmicks imaginés par les inventeurs du genre en leur temps, hand-claps compris.
Malheureusement, le quatuor pêche par son manque total de recul et, contrairement aux pré-cités Suédois, peine à s’extirper de ses références écrasantes. A trop vouloir rendre hommage, les jeunes américains finissent par singer leurs aînés et oublient leur personnalité en route. Les Mando Diao avaient brillamment réussi l’exploit de forger un disque ébouriffant et formidablement personnel dans un moule maintes fois ébréché par des groupes beaucoup moins inventifs. Les Locksley se contentent de conduire leur incontestable talent à trousser des chansons robustes dans un musée de cire. La faute sûrement au style choisi, tant la pop britannique 60’s est figée dans son passé, coulée dans le bronze modelé par des groupes majuscules jamais égalés depuis. Eussent-ils opté par le folk-rock comme bon nombre de leurs concitoyens, nous n’y aurions probablement trouvé rien à redire, noyés dans la foule d’épigones d’un genre aux racines bien plus profondes et bien moins identifiables. Mais cette musique-ci est tellement marquée par le sceau de ses géniteurs que la renouveler relève en effet de l’exploit. Et d’exploit, il n’en est pas question une seule seconde dans ce disque, malgré une production résolument catchy (l’influence Strokes/Lib’s) qui sied bien au genre. Même les voix relèvent de l’imitation parfaite.
Reste un bon petit disque inconsistant qui nous permettra de passer sans trop de casse cet interminable hiver. Et qui nous incitera surtout à nous replonger dans les incunables, l’abandonnant à son triste sort de petit disque. Souhaitons juste aux Locksley une mise en perspective et surtout une maturation salutaire, sous peine de vite tomber dans la recette.
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