L’expérience dans les contrées de Wolf Parade et du label Constellation semble avoir été profitable à cette formation toulousaine. Un rock ténébreux, porté par une section rythmique accablée, à la croisée du post-rock et des lendemains punk. Une révélation.
Après avoir mis Montréal à feu et à sang en 2008 (on exagère un chouia, mais c’est pour la bonne cause), quatre toulousains dans le vent s’en sont donc retournés dans la ville rose. A l’écoute de ce premier album flamboyant, les Montreal On Fire — c’est leur nom — n’ont manifestement pas traversé l’océan Atlantique pour nous revenir les mains vides. Ce quatuor post-rock a ramené dans ses étuis à guitare un sens du rock rugueux fort précieux.
On ignore s’ils ont traîné leurs guêtres au mythique studio Hotel2Tango durant leur exil québécois, mais le son brumeux, parfois angulaire, de ce premier opus procure le vertige. Issue de la scène hardcore locale (I Pilot Daemon et Plebeian Grandstand), cette formation concentre son tir sur une configuration rock séminale à guitares, basse, batterie. Or, si le terrain offensif du quatuor se veut restreint, la mise en place se montre magistrale. L’urgence punk de naguère a mué, le tempo s’est sensiblement ralenti pour mettre en exergue une dramaturgie ample, proprement incandescente : des guitares lentes et atrabilaires prennent le temps d’installer des atmosphères pesantes (et non pas plombées), pénétrant lentement mais surement dans le subconscient de l’auditeur possédé. Souvent, le degré de cette force engagée, limite épique, résonne comme un geste tragique définitif, poétique et désespéré.
En dépit de moyens techniques limités mis à dispositions, Decline & Fall démontre que les recherches soniques développées par les physiciens que sont Martin Hannett (Joy Division) et John Congleton (Explosions In The Sky) ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd. Une magnifique reverb grinçante évoquant le frottement de métaux en érosion happe littéralement les huit pièces tourmentées de Decline & Fall : le spatial “Anything Everyday”, ou encore l’intro dantesque “Is It Another One”, les arpèges en reddition de “Beyond The Beauty”… Sur le grandiose “Anything Everyday”, ce sont carrément The Chameleons qui se seraient lancés dans une reprise électrique des Red House Painters… Adrien Broué, voix stridente peut-être encore pas suffisamment polie par le temps, distille pourtant bien son charme grâce à une conviction sans faille capable de tenir tête au chaos instrumental qui se trame en direct. Son rôle n’est pas peu de choses tant la bête s’agite derrière.
Dans le genre, ce baptême du feu mériterait de récolter les lauriers trop hâtivement décernés à quelques nouvelles formations anglophones mieux loties comme les Crystal Stilts. De plus, le soin porté au visuel signé par le guitariste Romain Barbot ne gâche en rien le plaisir d’écoute. Contrairement à son message, Decline & Fall est un disque plein de promesses, réjouissantes.
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– Site du label Lacrymal Records