Le contrebassiste Stéphane Kerecki a de la suite dans les idées. De son précédent et second album Focus Danse (2007), enregistré avec le même trio (Mathieu Donarier aux saxophones, Thomas Grimmonprez à la batterie), se dégageait une belle souplesse dans la circulation des instruments et l’agencement de propositions musicales situées aux confins d’un jazz virevoltant, épris de groove comme de musique contemporaine. Houria poursuit cette approche, avec en sus une simplicité assumée et davantage de place accordée à l’improvisation, certaines compositions ayant même été raccourcies a posteriori pour satisfaire ce désir de spontanéité, sinon de ferveur collective qu’un travail d’écriture plus affirmé aurait contrariée. S’affirme également une inspiration nord-africaine décelable dans le foisonnement polyrythmique, les touches percussives, tantôt coloristes, tantôt syncopées, ou les effets d’embouchures qui évoquent presque un kalimba (“Houria”). Cette orientation essentiellement impressionniste n’est toutefois pas sans céder à l’écueil d’une coquetterie exotique, les compositions du contrebassiste dénotant un manque de profondeur de vues — notamment esthétiques — en la matière. La plus grosse surprise et valeur ajoutée de Houria provient en fait de la participation du grand saxophoniste ténor et soprano Tony Malaby, omniprésent sur la plupart des plages (il est alors localisé sur le canal sonore gauche), à qui est même dédié une mémorable “Suite for Tony”. Lors de trois duos avec Stéphane Kerecki, courtes pièces introductives aux morceaux qui les jouxtent, où les deux voix communient et se tournent autour à la fois, l’ami américain devient ce précieux confident venu altérer par ailleurs les rondeurs d’un jazz et d’une africanité dans l’air du temps qui, s’ils ne sont pas sans délivrer quelque sortilège sonore, donnent le sentiment de répondre davantage aux exigences d’un programme de liberté (traduction littérale de « houria » en arabe) que de se libérer de tout programme exigé.
– Le site de Zig-Zag Territoires
– En écoute : « Houria »