Après Group Inerane découvert l’année dernière, voici venu le tour de Group Bombino, objet du second volume des Guitars From Agadez uniquement disponible en format vinyle. Le succès, voire culte outre-Atlantique généré il y a deux ans par Group Doueh aurait-il suscité un effet de mode qui, telle une traînée de sable, se verra bientôt balayée par un vent contraire ? On serait volontiers porté à le croire si ces musiques indomptées et parfois clandestines venues d’Afrique subsaharienne n’imposaient pas, sans coup férir, leur nécessité d’être. C’est là tout leur paradoxe : primitives et inhospitalières par bien des aspects (enregistrements approximatifs, restitution lo-fi originelle éloignée des canons occidentaux de la world music), elles possèdent pourtant cette capacité propre à subjuguer d’emblée et durablement, tout en témoignant d’une urgence palpable. Group Bombino ne déroge pas à la règle, bien que ses revendications s’avèrent moins épidermiques sur disque. Les plages acoustiques de la face A, enregistrées dans le désert au milieu des chameaux, découvrent ainsi un musicien folk apaisé et charismatique, le jeune (28 ans) leader touareg Omara Al Moctar, dont le toucher étonnamment mature s’inscrit déjà dans la lignée de celui de grands sages tels Abdulla Oumbadogou ou Ali Farka Touré. Aux antipodes de ces blues primitifs ponctués de choeurs et de percussions, la face B saturée d’électricité présente des sessions live du groupe enregistrées par le producteur/patron de Sublime Frequencies, Hisham Mayet, au cours d’un mariage, début 2007. Psychédéliques, portés par une énergie hendrixienne et des rythmes tribaux hypnotiques, ces morceaux bouillonnants de vie sont un hymne optimiste à la liberté autant qu’une échappatoire. Quelques jours après ce set, la ville d’Agadez connaissait un énième mouvement révolutionnaire touareg dirigé contre le pouvoir d’état dans le but de défendre le droit des peuples autochtones à jouir de leurs terres comme ils l’entendent. Un mouvement aussitôt réprimé dans la violence par l’armée qui, outre une série d’arrestations sommaires de nomades, interdit aussitôt les ONG locales et musela les médias (radio et presse). Et les guitares de battre le fer…
– Le site de Orkhêstra
– En écoute : « Amidinine »