Seattle n’a définitivement pas fini de nous surprendre. Alors que l’on pensait la ville vouée à la casse industrielle il y a quelques années, elle revit aujourd’hui sous un vent acoustique de fort bon augure — Sera Cahoone, mais aussi et surtout The Cave Singers. Acoustique mais pas forcément confortable. En atteste ce deuxième album de Jesy Fortino, alias Tiny Vipers, après un remarqué Hands Across The Void. Une guitare acoustique, une voix habitée, des lambeaux de mélodies, des textes en perdition, et des plages sombres qui s’étirent autant qu’elles s’enfoncent dans une nuit sans lune. L’image qu’a la jeune chanteuse de la vie sur terre ne laisse rien présager de bon : solitude, temps arythmique, dessiccation. Le programme est chargé. On pense souvent, dans ces étirements, à Josephine Foster — en moins abouti toutefois — et à ses chansons désossées sous nos yeux sans que la poésie ne disparaisse pour autant. Il faut, pour se laisser transporter par ce Life On Earth d’outre-tombe, attendre que le venin se distille et atteindre la deuxième partie de l’album sur laquelle l’expérimentation prend le pas sur la composition. Car si le début est vite rébarbatif pour une oreille distraite, avec cette voix monotone et ses cordes pincées comme un jour d’apprentissage, le disque prend progressivement une tournure plus grave qu’elliptique et finit par ne plus lâcher sa proie. Il faut une certaine dose de patience pour arriver à son terme, un casque digne de ce nom — le son Sub Pop, de pure beauté –, et une tolérance énorme pour les répétitions de thèmes simplissimes, mais au final Life On Earth finit par séduire. Une bonne introduction à la folk expérimentale, mais qui ne dépasse pas le stade de cours magistral.
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