Selon un concept désormais connu, le chanteur Boulbar évoque sur son deuxième album la rencontre (imaginaire ?) avec Jack Ranieri, ancienne prétendue gloire de la boxe américaine qui a fini sa carrière sur un malheureux casse d’une succursale de la Wells Fargo. Cette histoire, racontée par la BD signée Vincent Gravé dans une version plus luxueuse, a logiquement tout d’un conte que le chanteur s’empresse de mettre en musique. Oscillant sans vergogne dans l’univers musical américain des années 60, Boulbar livre 13 titres comme autant d’étapes dans cette vie plus que compliquée du champion coupé dans son élan. Accompagné d’illustres musiciens — dont J.M. Pires à la batterie, Jerry Edwards au trombone ou Marc Sens à la guitare –, le chanteur offre un vrai pot pourri en se faisant un plaisir total. Il a jeté dans ce projet toutes ses forces et rend de plus hommage, non seulement à un sportif brisé, mais aussi à toute une époque, un style archi-revisité mais ici encensé avec une classe certaine. Certes, le français se marie assez mal avec cette musique tellement connotée, mais le chant louvoyant de l’artiste permet de passer outre ce décalage, voire cet anachronisme appuyé, par une production parfois trop lisse. Demeurent des textes narratifs parfaitement explicites, écrits tel un polar en rimes, n’évitant aucun poncif (la superbe égérie qui fait perdre la tête au dur à cuire) mais se livrant avec un bonheur que rien ne pourra altérer à son plus vieux rêve. Alors même si l’effet n’est pas forcément aussi fort qu’espéré, on goûte sans problème ses orchestrations parfaitement maîtrisées, et on se laisse porter par cette histoire que l’on a déjà entendue cent fois mais qui fonctionne toujours autant. A l’occasion, certains titres crèvent même le plafond tant on s’y voit — “Ranieri – vs – Freeman”, qui raconte le combat de trop avec une émotion crue, ou la bien nommée “San Quentin”. Et d’apprécier finalement ce happy end inattendu, avec un rebondissement comme seul le mythe américain sait en créer. Un exercice de style plus touchant que renversant, mais qui a au moins le mérite de sortir un peu du lot des disques récitatifs. Bel effort.
– Le site de Boulbar