La fraîcheur d’un petit mojito avec menthe fraîche et glace pilée pressée sur CD.
Un père Noël en surpoids, une errance au beau milieu de New York, une photo floue prise à l’arrière d’une voiture du NYPD. Avec la pochette de Carpet Madness, doit-on s’attendre à une nouvelle loufoquerie pop-rock made in Brooklyn ? Pas du tout. Get Back Guinozzi ! est un quintette franco-français, formé par Fred Landini, à Toulon, programmateur du Midi Festival et Eglantine Gouzy, chanteuse basée à Londres. Un groupe dont la genèse s’est jouée à coups de mails, venant s’ajouter à la longue liste des formations (ou des albums) portées sur les fonts baptismaux par correspondance (Postal Service, Portishead…). Eglantine enchantée par les instrumentaux, Fred par la voix que la jeune femme posait dessus, ils décidèrent de former un groupe pour nous livrer une pop bain de soleil aux atours minimalistes jonglant avec les rythmes et les influences.
D’abord simplement équipée pour traverser la Manche, l’embarcation franco-française, repérée par le label british Fat Cat Records, est devenue un paquebot transatlantique tanké, métissé pour s’arrêter partout dans le monde, connaître les continents pour des escales festives et déraisonnées. Musique cambodgienne des sixties, dub, reggae, zouk, tropicalisme, new-wave… Get Back Guinozzi ! a pris le parti d’attaquer la pop, ce matériau dur, exigeant, parfois étonnamment conformiste, mais qui s’inscrit le mieux dans le temps Ainsi, GBG a pris sa pelle et en a gratté les contours pour y scotcher des influences rarement vues, en s’affranchissant souvent du sempiternel contrat couplet refrain, en fracassant les fins de chansons à coup de délires électroniques et psychédéliques.
GBG est un trait d’union. Les Antilles d’une part, la Grande-Bretagne de l’autre, le réchauffement climatique à la portée de tous. Chaque morceau est une exploration. Sur les rythmiques syncopées du reggae, Eglantine surprend avec une voix fragile, qui parfois dérape, va dans les aigus, mais se rattrape toujours aux branches du palmier. On flirte parfois avec une bossa, à l’instar de “Where You Are” : arrangements simples, refrain doux comme un édredon 100 % plume d’oies. « Go Back to School », entre des beats new-wave, nous glisse un refrain beau comme un choeur d’enfants, tandis que le rythme de “Low Files Tropical” nous submerge. Alors, on se rend compte aussi que le groupe se permet une répétition des voix, des rythmes, parfois ad nauseam (« Baby Baby »).
On songe aux Young Marble Giants, aux Talking Heads et plus récemment à Architecture in Helsinki, à Animal Collective, à Vampire Weekend. Bien sûr, Carpet Madness ne vient pas côtoyer les cimes d’un Contra mieux ficelé, mieux produit, plus cohérent. Mais les efforts déployés pour refaçonner une pop globale sont plus que louables, comme l’a souligné Pitchfork, loge maçonnique de la culture indé chez les US, qui lui a octroyé un joli 7,1 sur 10.
On repense alors à la genèse du groupe, à ces lettres qui ne restent jamais mortes et qui démontrent encore que l’Internet n’a pas toujours, contrairement à ce que l’on dit, vocation à assassiner la musique. Plus souvent, il la transmet. Mieux encore, et GBG est là pour en témoigner, il la fait naître.
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