Une « Plongée en si mineur dans les abysses… » de Loveless, nous permettrons-nous de rajouter, car telle est la quête obstinée de ce collectif norvégien depuis leur épique premier album éponyme paru en 2006. Si ce second opus n’en dévie pas d’un iota, Abyss in B Minor ne se résume pas tout à fait à un perpétuel recommencement, surtout lorsqu’il s’agit de sonder le chef-d’oeuvre psychédélique de Kevin Shields et ses infinies lectures. Au coeur de cette discorde sonique connue (“Reprobate!”, tout de même prodigieux décalque circa Anything Else), l’anar en chef Emil Nikolaisen ne se contente pas d’appliquer ses strates de guitares oxydées dans un cadre pop bien délimité. Serena Maneesh distord aussi les tréfonds inquiétants de l’âme. Loin, en effet, de copistes appliqués que sont par exemple Amusement Parks On Fire, Serena Maneesh explore la peur du vide, n’hésite pas à perdre de vue ses points d’attache mélodique pour s’engager vers des états psychotiques. Sur ce second opus condensé en huit titres, le maelström shoegazy inclut quelques arrangements délicats tels une flute, un vibraphone ou un piano. On avait presque oublié que Sufjan Stevens, dont on ignorait le penchant pour les guitares fuzz à haute combustion, jouait déjà de la flute et du marimba sur “Candlelight”. De cette ébullition orchestrale surnagent les vocaux prédominants de la pianiste Lina Holmstrøm, dont on ne sait trop s’ils sont rêvés ou réels. Notons aussi dans la mise en (dif)forme, l’injonction de sales beats urbains et de samples cauchemardesques sur quelques nouveaux titres, dont le producteur Nick Terry — fidèle collaborateur de Primal Scream — n’est certainement pas étranger. Autre gage de danger auditif, la présence de René Tinner, ingénieur du son connu derrière les épopées choucroutes de Can. Autant dire qu’accoler la mention « à écouter très fort » à S-M 2 : Abyss in B Minor ne saurait être déplacé.
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