Les coeurs purs de l’indie pop remettent le couvert après deux ans d’absence, toujours aussi résolument déterminé à sonner « 90 » en 2011.


En bourse on appelle ça une valeur refuge. Une mesure possédant la vertu de pouvoir s’apprécier en permanence, de se mettre à l’abri en cas de crise financière ou de forte dépression. La crise justement, encore et toujours, pour alimenter les explications. Crise du porte-monnaie, du disque ou du rock – qui lui, c’est bien connu, n’en finit plus de mourir depuis des décennies.

“Lorsque tu ne sais pas où tu vas, regarde d’où tu viens”, semble ainsi s’être répété The Pains Of Being Pure At Heart, lors de l’élaboration de Belong, deuxième effort sur lequel il ne perd aucune occasion de citer tous ses groupes préférés à longueur de titres. Le quatuor qui, depuis 2007, s’évertue si bien à faire du neuf avec du vieux, se doit à présent de dépasser le retour de hype qui l’a fait s’élever au-dessus de la mêlée, l’intronisant, souvent à juste titre, nouveau prodige du shoegaze. Il doit démontrer, si ce n’est à la terre entière, du moins à ses nombreux aficionados, qu’il lui reste encore des billes dans son sac et ainsi faire mentir les pronostiqueurs qui voudraient qu’un groupe se prenne les pieds dans le tapis dès son fatal deuxième essai.

Et le moins que l’on puisse dire c’est que la plupart du temps, le groupe marque des points en réalisant de percutantes mélodies binaires, saupoudrées de-ci de-là de nappes electro, révélant même, par moment, quelques tentatives salutaires d’actes d’indépendance par rapport aux nombreux clins d’œil appuyés en direction de My Bloody Valentine, à l’exemple de l’agréable « Heart In Your Heartbreak ».
Et l’on se prend à rêver alors qu’« Ah oui décidément, si Kip Berman et sa bande avaient émergé au début des années 90, combien ils auraient peut-être su tenir la dragée haute à Ride et Jesus and Mary Chain! ». Sauf que The Pains Of Being Pure At Heart est un groupe des années 2010, qui évoque d’ailleurs bien moins les auteurs de Loveless sur ce nouvel opus que parfois les Smashing Pumpkins sur Siamese Dream, à l’image du single « Belong » qui ouvre l’album de manière, il faut le dire, assez convaincante. Se faisant souvent moins « twee » mais toujours pop, avec des chapes de guitares fiévreuses qui alimentent la manne aux fantasmes de voir ces rejetons de l’ère grungy nous refaire le coup des guitares cradingues et de la poésie mélancolique de l’adolescence trouble. Et ça marche dans la plupart des cas. Bien plus de la moitié des titres de Belong sonnent comme des mini-hits en puissance et décochent facilement des hochements de satisfaction à ses auditeurs. Alors pourquoi donc bouder son plaisir ?

Parce que l’on ne peut s’empêcher de se demander s’il ne sera pas tout de même difficile, à la longue, de créer un lien privilégié avec ces New-Yorkais qui semblent piocher à droite et à gauche leurs bonnes idées, sans jamais parvenir à leur faire dépasser le stade de la citation. The Pains Of Being Pure At Heart ne possède rien qui les singularise, si ce n’est d’écrire des titres au demeurant très sympathiques. Et, si pour certains c’est déjà beaucoup, pour d’autres, Asobi Seksu ou No Age sont déjà entrain de creuser le même sillon, avec peut-être plus de pertinence.
Le problème majeur après l’écoute de cet album consistera surtout à se retenir d’aller dépoussiérer l’exemplaire d’Ecstasy and Wine de My Bloody Valentine logé sur l’étagère. Mais, si l’on se retient de cet acte coupable et très peu fair-play, Belong reste, sur la longueur, un bon album de noisy pop des familles, qui confine tout de même The Pains of Being Pure At Heart à son pré carré un poil restrictif de groupe-hommage.

Peut-être, finalement, la seule vertu de cette formation, est de nous faire encore plus apprécier les groupes dont on s’est mille fois délecté et repassé les disques ? Et après tout, confidence pour confidence, si c’était précisément parce qu’ils ne révolutionnaient rien, qu’on les aimait bien, les Pains Of Being Pure At Heart ?

– À voir : leur portrait filmé !

Site officiel

– En écoute: « Belong » :