Sous ce ciel rouge marsien se cache le plus surprenant contre-pied musical du moment. Qui aurait parié que Julien Pras, fin et sensible songwriter des estimés Calc, prendrait un tel virage bruitiste ? Surtout après s’être offert l’an dernier une escapade solo, d’obédience pop/folk, soyeuse à souhait. Rejoint par deux membres d’Alba Lua (Jimmy Kinast à la batterie, Benoit Busser à la basse), ce nouveau projet du guitariste et chanteur girondin verse en effet dans la catégorie rock poids-lourd : un trio rock séminal, frappé du sceau stoner rock, au psychédélisme sous-jacent. Mais relativisons cette épaisseur somme toute très mélodique. Couchée sur des rythmes lents et des riffs hypnotiques, MRS tire toute sa pesanteur massive de ses sinueuses lignes mélodiques, déployées à l’unisson par le duo guitare/basse, élaguant des atmosphères nauséeuses d’une noirceur de profundis. Seul point de lumière extirpé de ces frondes guitaristiques faisant autorité, le chant éthéré de Julien Pras survole, tel un Shaman, ces terres magmatiques dévastées (« Strong Reflection », « Marble Sky », dont le chant évoque… Ozzy Osbourne !). Il y a du Black Mountain dans cette façon de pervertir le rock seventies en usant de psychotropes plus contemporains (« Saddle Point », est aussi une jolie intrusion world/folk, zeppelinienne en diable). On pense aussi, dans une configuration serrée plus proche, aux forcenés de Dead Meadow et Witch. L’ascendance du trio s’illustre notamment magnifiquement sur « Falls », et son riff colossal, embrumé d’une pédale wha des plus érosives… Si Julien Pras ne nous avait pas jusqu’ici habitué à pousser les potards à un tel niveau de décibel sonore, on souhaite dorénavant, à lui et ses acolytes, de continuer de battre le fer sous ce ciel inquiétant.