Cinquième album, haut en décharge électrique candide, d’une valeur sûre de la power pop.
« Our old, Familiar friend » is back. Le songwriter de Nashville, anciennement de Detroit, est une vieille connaissance depuis son inusable One Mississippi en 1996. Pour beaucoup, il est pourtant le co-géniteur de The Raconteurs avec le plus célèbre rockeur blanc des années 2000, Jack White. Pour une petite mais fidèle minorité, il est surtout l’auteur en solo de quatre albums de power pop impérissables. Et l’on parle ici d’authentique power pop, celle de la suprême constellation seventies Big Star, Dwight Twilley, mais aussi Elvis Costello et les Wings de Sir Paul & Linda McCartney.
On aurait aimé que le succès de son super groupe lui ouvre enfin une certaine reconnaissance en solo, mais c’est loin d’être le cas. My Old Familiar Friend paru en 2009, serti de splendides arrangements de cordes, n’a pas profité de la vague et fut un semi-échec, plus précisément public que critique. What Kind of World, ne remet pas en cause le talent d’écriture de ce songwriter décidément constant, désormais père (cette grande responsabilité lui aurait redonné confiance en son songwriting).
Enregistré et autoproduit dans son propre studio en compagnie d’hôtes estimés, notamment les ainés Jon Auer et Ken Stringfellow de The Posies venus croiser le manche Fender sur quelques pistes, What kind of world prêche les mélodies nerveuses et accrocheuses, avec ce savoir-faire rare qui l’écarte de toute faiblesse servile. L’artisan Benson n’a pas cédé aux modes – seule la pochette au grain noir et blanc très eighties pourrait prêter à confusion – et même retrouvé confiance en ses guitares vintage sur les vigoureux « Light of Day », « Happy Most of The Time » et « Here in the Deadlights ».
Le Raconteur blond n’a pas son pareil pour pousser sur une rampe de décollage des refrains d’une intelligence mélodique digne des anciens (insistons sur les parrains cités plus haut, Alex Chilton, Paul Mc Cartney, des gens de ce rang là…). De l’art subtil de répéter un refrain sans lasser, en disséminant stratégiquement des détails aussi infimes à l’oreille que cruciaux dans les aboutissants : il faut écouter le faussement candide mais à la progression d’accords redoutablement ciselée « Met for Match », ou encore le quasi post-punk « Thru The Ceiling ». Même dans le registre de la ballade romantique au piano (« Bad For Me »), le brillant parolier se distingue, plus profond que ses mélodies lumineuses ne le laissent supposer. Lui qui avait jadis repris « Let Me Roll It », le disciple de Macca ne peut encore une fois s’empêcher de glisser un clin d’œil au classique Band on The Run sur « No One Else But You ». On vous laisse découvrir la surprise…
Benson n’a rien d’un visionnaire (ce que certains semblent lui reprocher), sa seule ambition se résume à s’évertuer à écrire de bonnes pop songs. Et autant dire que sur ce plan, peu de disques sortis ces six derniers mois peuvent tenir contre les douze missives de What Kind of World. Dans un monde équitable, cette galette mériterait autant de succès que l’album solo de son acolyte l’ex-White Stripes. Laissons la hype aux radios onde courte et régalons nous de ce pur concentré de bonnes vibrations. Honnête et sans failles.
Brendan Benson – « Here In The Deadlights »