Mat Cothran alias Elvis Depressedly sort son nouvel EP, le second en six mois. Un disque pop/rock/psyché fait de bric et de broc, avec deux bouts de ficelles et une foule d’idées à revendre.


Vous êtes un quarantenaire ou un pré quarantenaire ayant connu France Inter à la fin des années 80, les Black Sessions à leur début, les grandes années des Inrocks ? Celles où vous attendiez avec une ferveur sans pareille la parution bimestrielle de votre magazine préféré, où vous vous branchiez sur votre radio dès 21 h avec interdiction d’interrompre la messe journalière sous peine de représailles immédiates et d’une rare intensité. Un temps que les moins de vingt ans…..(vous connaissez la suite) Un temps où vous découvriez, émerveillés, le Slanted & Enchanted de Pavement, les huit albums par an que pouvaient sortir sans crainte Babybird ou Sebadoh, la pop rageuse et bricolée de Chris Knox.

Vous êtes quarantenaire et ahhhhhhhhhhhh….. comme vous le regrettez ce temps.
En y repensant vous regrettez cette insouciance, cette légèreté, ces albums mélodiques, bordéliques, bricolés avec peu de moyens et pourtant attachants qui sortaient à la pelle durant ces années bénies. Sachez que Mat Cothran, ex Coma Cinema et désormais leader et seul homme à bord d’Elvis Depressedly, doit penser à peu près la même chose que vous. Pour ce faire, il sort, en à peine neuf mois, son troisième disque : Holo Pleasures. Un Ep de six titres bricolé avec peu de moyens : une guitare, un semblant de batterie, quelques effets et un talent évident pour les mélodies accrocheuses, les morceaux qui vous restent vissés dans le crâne dès la première écoute.

Pour vous donner une idée, imaginez vous un Beck sans le sou, fauché, raqué, à sec, qui se serait mis en tête de réinterpréter le sometime de My Bloody Valentine sans le mur du son caractéristique du groupe irlandais. Ca vous paraît improbable ? Pourtant Mat Cothran, en moins de quatre minutes, vous le propose sur « Okay » et « Pepsi/Coke Suicide ». Outre l’exploit de fusionner/assimiler ces deux influences en si peu de temps, Cothran se permet même d’ajouter un soupçon de mélancolie, rendant par la même occasion ces morceaux indispensables.

Ensuite, sur les quatre autres, pas mal d’influences y passent : Syd Barrett, Daniel Johnston sans la folie furieuse, Pavement, Sebadoh (les deux pour le côté bricolé des morceaux, l’immédiateté des mélodies), les Magnetic Fields de 69 love songs, entre autres. Vous l’avez compris Holo pleasures est un disque bricolé, simple, sans développements d’accords, ni descente de gammes indigeste, ici prime le brut de décoffrage, la mélodie pop immédiate (« Thinning Out »), le son crade, une sorte de garage-pop libre de toute obligation en quelque sorte.
Sans être un chef-d’oeuvre absolument indispensable, ce à quoi Holo Pleasures n’aspire pas à être de toutes façons, auquel cas certains des morceaux auraient été un peu plus développés, il s’agit tout de même là d’un disque des plus réjouissants sorti depuis ce début d’année. Un plaisir immédiat et simple. Comme disait un slogan publicitaire il y a quelques années : ne passons pas à côté des choses simples.

Elvis Depressedly – « Okay »