Malgré un patronyme pas très encourageant, ces nouveaux mendiants – en l’occurrence Joe Pernice et le Teenage Fanclub Norman Blake – sont pourtant millionnaires dans la catégorie pop divine.


Profitons d’une accalmie estivale pour revenir sur un de nos disques de chevet de l’année, le premier album paru en mars du « super groupe » The New Mendicants. Soit la rencontre inespérée entre deux illustres bienfaiteurs de la pop délicate à guitare : l’Américain Joe Pernice (Pernice Brothers, Scud Mountain Boys) et l’Ecossais Norman Blake (Teenage Fanclub, Jonny… pour n’en citer que deux). Autant dire que ce n’était pas gagné géographiquement de réunir ces deux fins orfèvres de la mélodie noble. Mais une bonne étoile veille sur la constellation indie pop : les deux songwriters vivent actuellement à Toronto, chacun marié à une Canadienne. Il ne pouvait donc en être autrement qu’ils finissent par se croiser, tous deux ayant de plus, eu l’occasion par le passé de partager chacun la même scène avec leurs groupes respectifs. Cette association entre expatriés cinq étoiles est complétée par le batteur canadien Mike Belitsky, des figures locales de The Sadies.

On s’en doute ici, point de headbanging ou de tentative dubstep, The New Mendicants s’emploient humblement à ce qu’ils savent faire le mieux : une folk/pop précieuse aux arrangements racés et intemporels, flanquée d’une mention B+ (comprendre Byrds, Beatles, Beach Boys, Big Star). Entre la voix tendre et suave de Joe Pernice et les arpèges de Rickenbacker de Norman Blake, les amateurs des Pernice Brothers et Teenage Fanclub seront donc plus que comblés – Mention spéciale à « A Very Sorry Christmas » dont on décerne d’office le « Grand Prix power pop » du fameux fanclub ado écossais.

A l’image de la jolie pochette de l’album, The New Mendicants savent broder des mélodies qui ont le don de nous faire sentir confortablement bien, tout de suite chez soi. Même sur le rock nerveux et relevé « Shouting Match », le chant de Joe Pernice garde sa douce mélancolie, incapable de brusquer. Et c’est tant mieux. Les harmonies vocales du duo se complètent merveilleusement (le timbre voilé de Norman Blake qui nous rappelle celui de Chris Bell, possède un certain charme), à l’instar du faussement innocent Cruel Annette, popsong irrésistible façon Lennon/Mc Cartney période Rubber Soul. Et cela en est même limite écÅ“urant tant tout cela semble si facile pour eux d’écrire des refrains élégants (« Sarasota », « High on the Skyline ») et dénués de la moindre once de lourdeur.

Après avoir renoué avec ses anciens camarades des Scud Mountains Boys l’an dernier pour un excellent disque de country sentimentale, Joe Pernice n’a manifestement eu aucun mal à se replonger dans les harmonies pop chatoyantes. L’Ecossais quant à lui, se contente de chanter au premier plan sur un seul titre, une superbe reprise du classique folk de Sandy Denny (la tragique chanteuse de Fairport Convention), « By The Time It Gets Dark ». Seul curiosité qui bouscule un peu la belle quiétude du disque, « Lifelike Hair » (placé en dernière piste), se veut une jam enfumée forcément très référencé à feu Lou Reed période The Velvet Underground. Enfin, la chanson éponyme « Into the Lime » pourrait parfaitement figurer sur la BO d’un film de Wes Anderson. Après réflexion, l’univers singulier du cinéaste résumerait bien la couleur de ce disque : léger et léché. On en attendait pas moins de ces deux songwriters qui font le bonheur des épicuriens de la pop depuis déjà près de 25 ans.