Second album pour les étoiles garage-shogazy de Vancouver, sous un jour ombrageux mais non moins habité par la grâce.


A l’échelle du bon goût, Shimmering Stars avait placé la barre très haut dès son premier single « I’m Gonna Try » en 2010, en réussissant l’alliance fantasmée entre les chÅ“urs divins des Beach Boys et la dream pop séminale de Galaxie 500. Puis le premier album Violent Hearts (2011), du groupe de Vancouver emmené par le talentueux Rory McClure, avait su brillamment prolonger le charme de cette alchimie succincte.

Là où bon nombres de formations néo psyché/garage, arrivé le cap du second album, font la grossière erreur de justement « grossir » leur son, et de fatalement perdre leur identité, Shimmering Stars a parfaitement conscience du carcan musical auquel il adhère, mais demeure assez audacieux pour le retourner à son avantage, voire le magnifier. Avec l’art et la manière. Pour avoir longtemps peaufiner en autarcie ses démos, le leader et multi-instrumentiste canadien Rory McClure connait sur le bout des doigts le son Shimmering Stars, son projet solo à l’origine. Ces douze titres ont ainsi été autoproduit et enregistrés par son groupe au Garage Mahal basé près de Vancouver, puis mixé par l’ingénieur du son Colin Stewart et figure de la scène locale (Black Mountain, AC Newman).

Battis sur ces bases solides, Bedrooms of the Nation ne décevra nullement les amateurs des chimères étoilées. Si le son est immédiatement identifiable, le (désormais) quatuor a toutefois tenu à apporter quelques changements d’humeur notables. Qui sont significatifs dès l’intro : les nuages blancs de l’adolescence virent progressivement au noir, avec les guitares placées au centre du cyclone. Pas de place pour des arrangements superflus, les six-cordes électriques se chargent d’ériger des bourrasques atmosphériques s’élevant jusqu’à donner le vertige, puis replongent à grand coup d’arpèges cristallins. On est sidéré par ce mur du son fuzz/shoegazy érigée sur « Dérèglement ». Les tempétueux « If You Love Me Let Me Go » et « Shadow Visions » font une spectaculaire démonstration de bruit blanc mélodieux, quasi épique. L’imparable single « Role Confusion » célèbre quant à lui les noces heureuses de Phil Spector et des Pixies. On pense aussi parfois à l’unique album de Lift to Experience, pour cette confrontation entre grâce sacristique et dramaturgie des guitares. Car aussi fragile soit-il, l’équilibre est miraculeusement maintenu – ou sauvé c’est selon – par ces harmonies vocales perpétuant l’innocence de la pop sixties (les Everly Brothers sont une de leurs grandes influences).

Le disque se clôt tout de même sur une note d’optimisme – l’enlevé « I Found Love » – comme si les canadiens ne pouvaient se résigner à rester en colère très longtemps. Ah… ces indécrottables songwriters pop… chassez le naturel il revient au galop ! Toujours est-il que Shimmering Stars ne plus être considéré comme un doux rêve de pop vrillé, ni une étoile filante, mais une valeur sûre.