Retour des canadiens là où on les avait laissé il y a trois ans : un bandeau sur les yeux et les six pieds sur la pédale d’accélérateur.
Si vous ne l’aviez point remarqué, 2015 est, en matière de Noise Rock, une année particulièrement féconde. Elle commence en fanfare avec le quasi inaudible et pourtant indispensable Hexadic de Six Organs Of Admittance en février. Puis début mars avec le premier album de Fawn Spots, From A Safer Place, relecture particulièrement savoureuse d’Hüsker Dü, suivi de peu par celui de Spectres (également chroniqué en ces lieux) plus Shoegaze et tout autant imprégné par les psychotropes que celui de Chasny.
Aujourd’hui sort le nouvel album des Canadiens Metz, sobrement intitulé II. Et autant le dire, en matière de Noise-Rock/Grunge mélodique et barré, il va être difficile de rivaliser Vous cherchiez un disque puissant, conciliant bruit et mélodies ? Du post-punk sous amphétamines ? Trente minutes de haute tension sans aucun déchet (si on omet les 34 secondes inutiles de « Zzyzx ») ? de quoi alimenter le parc nucléaire français et remettre en état de marche Fessenheim ? Ramener à la vie le bichon frisé du voisin ayant involontairement fait le tampon entre l’asphalte et la gomme de votre véhicule motorisé ?
N’allez pas plus loin, avec la débauche et le surplus d’énergie que présente Metz, Frankenstein aurait pu faire revenir à la vie en un riff les deux gonzes dépressifs présents sur la pochette. Vivant dans une faille spatio-temporelle où le temps s’est juste figé, les Canadiens reprennent les hostilités là où ils les avaient laissé il y a trois ans. Sauf qu’entre temps, ils ont pris de l’assurance, du muscle, se sont enfilés l’intégrale des Jesus Lizard, passés en boucle le Metal Box de PIL et autres groupes Punk,Post-Punk et Dub des années 80 puis branché leur matos sur toutes les lignes à haute tension environnant leur studio.
En somme, si l’album conserve comme son prédécesseur un aspect bulldozer (leur musique est un vrai rouleau-compresseur irrésistible), le propos s’est quant à lui affiné. Mélodiquement parlant, ça dégraisse au maximum pour ne conserver que l’essentiel : des mélodies simples, carrées qui vont sans transition du nerf auditif à ceux des jambes sans se poser de questions. Et niveau production, idem : c’est tendu au maximum, violent, parfait équilibre entre les productions survitaminées de Butch Vig et celles sur l’os de Steve Albini. Bref, pour les quadras ayant connu le début des années 90, ce II rappellera immanquablement le potentiel et l’excellence d’un petit groupe de Seattle sans l’aspect acoustique de leur musique.
Petite mise en garde tout de même : pour les quadras en fin de parcours, nostalgiques et ruinés par les abus divers, il faudra, sous peine de risque d’infarctus, demander une prescription médicale afin de pouvoir écouter ce second album des Canadiens. L’épuisement cardiaque lié à l’aspect énergivore de ce II infernal risque de ruiner les comptes de la sécurité sociale. Ne dites pas après que vous n’avez pas été prévenus.