Bienvenue chez Grimes, un univers peuplé de créatures manga aux grands yeux triplés, de refrains pop débridés, où l’esthétique gothique danse en boots fluorescentes.
Bienvenue chez Grimes, un univers peuplé de créatures manga aux grands yeux triplés, de refrains pop débridés, et où l’esthétique gothique danse en boots fluorescentes. Ce genre d’excentricité légère. En trois albums, dont le salué Visions paru en 2012 chez la vénérée maison indé 4AD, la canadienne Claire Boucher aka Grimes (né en 1988), a fait l’objet d’un « big buzz » interplanétaire, devenant un curieux phénomène de la pop musique issue de la scène DIY. Chanteuse, multi instrumentiste et productrice, la jeune femme prétendait avoir entièrement enregistré son disque sur le logiciel Garageband (attention le méchant coup de vieux !). L’album, loin d’être parfait, n’était pas pour autant dénué d’un charme bigarré et naïf, à double tranchant. Sur une poignée de singles revigorant et sans trop se prendre au sérieux, Grimes y emmenait sa culture populaire dans des recoins tordus, se jouant des codes populaires avec un aisance “cyberpop” propre à sa génération geek. Mieux produit cette fois dans des conditions studios, Art Angels met les bouchées double, voire impressionne par son flux(orescent) d’idées débridées et mélange des genres : New Wave, chÅ“urs médiévaux, R’n’B, trash pop et vocaux suraïgues à la Cindy Lauper fusionnent gaiement. Habilement calibrés sur des mélodies accrocheuses à souhait, les quatorze chansons d’Art Angels, ont réussi à ne pas trop céder d’espace à la liberté d’expérimentation de sa génitrice et ses envies de brouiller les frontières artistiques, même celles du 7e art. Le bien nommé single horrifique « SCREAM », avec ses saillies de riffs metal, se paie en sus une touche d’exotisme avec la rappeuse taïwanaise Aristophanes. La synth pop ténébreuse de « Kill. V. Maim », serait quant à elle inspiré par Al Pacino dans le Parrain 2. « Easily », sur une note plus légère et gracieuse, donne l’impression d’entendre non pas un ange arty comme le suggère le titre de l’album, mais plutôt une petite fée punky (Brewster). Si on est en droit de lui préférer le génie tribale d’une tUnE-yArDs, on ne peut nier que Grimes possède une identité suffisamment forte pour fédérer grand public et amateurs de musique plus exigents. Les hymnes solaires « California », le single « Flesh Without Blood » et « Artangels » confortent cette idée de machine à tubes délurée.