Sorti un peu dans l’indifférence cet été, en plein coeur d’un mois d’août déserté, le premier album d’Exploded View mérite pourtant toute notre attention, séance de rattrapage tenante.



Sorti un peu dans l’indifférence cet été, en plein coeur d’un mois d’août déserté, le premier album d’Exploded View mérite pourtant toute notre attention, séance de rattrapage tenante. Ce projet collaboratif concentré autour de la chanteuse Anika, est l’une des choses les plus intrigantes entendues ces derniers mois. Nous avions un peu perdu la trace de cette germano-britannique révélée en 2010 par Invada Record, le label fondé par Geoff Barrow de Portishead. Ce dernier avait lui-même produit son premier album, essentiellement constitué de reprises  (Dylan, les Kinks, Yoko Ono) revisités à la sauce kraut. Sympathique mais un peu anecdotique, il faut l’avouer. Elle nous revient au sein donc de ce collectif, entourée de trois musiciens/producteurs manifestement inconnus au bataillon – le Suédois Martin Thulin et la paire mexicaine Hugo Quezada et Hector Melgarejo –  mais qui maîtrisent indéniablement leur partie, à savoir dérouler des textures grinçantes et minimalistes nappées d’une reverbe lugubre. Un peu expérimental, un peu arty, ces onze explorations Kosmische sont guidés par la voix incantatoire et magnétique d’Anika, déesse ténébreuse dans le sillage de Nico période  Desertshore.  Ainsi, « Lost Illusions » nous cueille d’emblée par un bourdonnement oppressant, et cette sensation ne ne nous quittera plus jusqu’à la fin du disque. On perçoit aussi les influences de Broadcast pour cette approche esthétisante jusqu’au-boutiste, notamment sur « One Too Many », oraison vespérale aux guitares stridentes. Et puis surtout BEAK>, le trio instrumental formé par Geoff Barrow, qui fut jadis le backing band d’Anika. Ceci expliquant cela. Deux des meilleurs morceaux du disque – « Orlando » et « No Parties in the attic » – insufflent un beat  dansant noctambule, relent de No Wave à la Lizzy Mercier Descloux… L’album est court mais fonctionne curieusement tel un continuum, et peut s’écouter plusieurs fois en boucle sans donner l’impression d’en faire le tour. Pour cette petite singularité, la dernière recrue du label brooklynois en vogue Sacred Bones mérite de figurer au planning de rentrée pour tout amateur de  musique corrosive.

Sacred Bones / Differ-ant – 2016
Site officiel et Page Facebook 

Tracklist:

1 Lost Illusions
2 One Too Many
3 Orlando
4 Call On The Gods
5 Disco Glove
6 Stand Your Ground
7 No More Parties In The Attic
8 Lark Descending
9 Gimme Something
10 Beige
11 Killjoy