20 ans d’activité, de beaux moments, et le plein de mélancolie pour la dernière. Glen Johnson et son Piano Magic s’éclipsent avec brio.


 

1996 : alors en devenir et en répétition, L’Anglais Glen Johnson et son ami musicien Dick Rance sont attirés par un vinyle 25cm (10 inch) posé au sol ; un medley de piano au titre évocateur : Piano Magic. Cette découverte qualifiée de signe spirituel par nos compères – sera interprétée comme celle d’un fantôme leur indiquant la voie à suivre. Leur histoire est en marche. Rétrospectivement, dixit Glen Johnson, ce nom s’avérera difficile à porter. Ils s’auto-proclament et s’auto-classifient « ghost rock » et mèneront leurs barques dans les eaux froides de la musique électronique et des guitares. Un savant et subtil mélange des genres. Le label 4AD les accueillera tout naturellement. Glen Johnson sera le pivot de sa formation autour de laquelle graviteront bon nombre d’invités (Vashti Bunyan, Brendan Perry (Dead Can Dance), John Grant ou Alan Sparhawk (Low)).

2017 : Closure. Sans faute de goût, cette ultime production clôt définitivement l’histoire de Piano Magic. Son titre explicite acte la fin d’un parcours. Spéculation ou simple intention ? Il n’en est rien. Glen Johnson tire définitivement un trait sur 20 années d’activités. ‘’L’œuvre de sa vie’’ mise en sommeil, on peine à imaginer l’état d’esprit de son géniteur au moment de prendre cette décision. Essoufflement, regret, soulagement ?…  Johnson s’efface comme il est apparu, dans la discrétion et sans crier et gare. De récents, personnels et douloureux événements ont peut-être accéléré sa décision. Une série de quelques concerts anniversaires fin décembre 2016 ont aussi précédé et accompagné cette sortie. Tout a été fait comme il se doit. En quelque sorte.

Ce 12ème opus est une belle fin. Les mélodies sont convaincantes, les chansons s’étirent au gré du spleen de son auteur, un climat et une atmosphère romantique et mélancolique se mettent en place et perdurent. La voix de Johnson est claire, suave et entreprenante. La production ad hoc élève les mélodies. Le disque s’apparente à une douce et triste méditation. Il pourrait être la bande son de nos regrets ou de nos remords. Un bilan d’une vie passée au crible. Pas si loin dans l’esprit du retour de Sophia en 2016.

« Closure », le morceau-titre placé en ouverture, avait pourtant tous les atouts – dans la forme et dans le fond – du clap de fin idéal. Ce morceau a de l’épaisseur, une mélancolie tenace, de la tension, bref une ambiance de rupture. Des hauts et des bas rythmiques le jalonnent. Des claviers en sourdine introduisent un mélodica. De toute beauté ! Entre parenthèse, l’écoute de cet instrument à cordes nous évoque instantanément le musicien jamaïcain Augustus Pablo – le maître incontesté du mélodica. La parenthèse est refermée. Des chœurs masculins et féminins évanescents et éphémères parsèment ce morceau. Une trop courte mais homérique séquence de guitares noisy s’intercale. Le dernier tiers tout instrumental s’effile et se clôt dans la douceur.

La fin justement ? Le bout du bout, le dernier morceau gravé, c’est l’un des sommets de l’album. « I left You Twice, Not Once » est finalement idéal pour clore l’aventure. Johnson s’est employé pour nous retourner le cœur. Ce morceau est poignant. Simplement mis en musique il est accompagné du strict nécessaire – piano, violon, claviers célestes, quelques notes de guitares enlevées …. Un adieu qui n’en appelle pas d’autres.

Entre les deux se cale une série de titres très convaincants. Le dynamique « Landline » et ces guitares chatoyantes et ondoyantes ou l’intimiste et le personnel  « Exile », 1er extrait de cet opus, découvert en fin d’année dernière, et qui à l’époque nous avait aiguillés sur les intentions de son auteur. Johnson nuance constamment les ambiances et confirme son agilité sur les terrains plus ardents. Dans une veine chaleureuse et énergique, « Let Me Introduce You » est une invitation sémillante, un titre pop d’emblée accrocheur. Son refrain et ses accords de guitares sont emballants.

Glenn Johnson a régulièrement collaboré avec de joyeux lurons. Pour sa dernière, Peter Milton Walsh (The Apartments) rentre dans la ronde. Il a co-écrit le morceau « Attention To Life » et prêté sa voix. Le résultat est un mix parfait des sensibilités des deux musiciens. La mélodie ne sort pas des sentiers battus mais son romantisme introverti est tenace.

Closure n’est pas une impasse. Glen Johnson a visiblement franchi une étape dans sa vie. De nouvelles perspectives se feront jour. En 2000 sur l’album Artists’ Rifles, Johnson chantait sur le magnifique titre ‘No Closure’ :

‘The truth lives with you

but no peace, no closure’

Il aurait pu chanter aujourd’hui :

‘The truth still lives with you

with the peace, and a closure’

 

Second Language – 2017

http://www.secondlanguagemusic.com/

https://www.facebook.com/PianoMagic

Tracklisting :

  1. Closure
  2. Landline
  3. Exile
  4. Let Me Introduce You
  5. Living For Other People
  6. You Never Stop Loving (The One That You Loved)
  7. Attention To Life (feat. Peter Milton Walsh)
  8. I Left You Twice, Not Once