Le chalutier de David Scott est de retour à bon port avec dans ses filets une miraculeuse collections perles pop aristocratique.
“Marina, contre vents et marées” pourrait être l’épitaphe du vénérable label germanique Marina, tant le voyage ne fut pas de tout repos. La maison indépendante basée à Hambourg souffle ses 25 bougies sur une ultime note, un peu triste : ce neuvième album de The Pearlfishers sera le dernier de son catalogue. Une double compilation rétrospective parue l’année dernière présageait de la chose, mais nous gardions espoir. En dépit de cette nouvelle, le duo d’esthètes à sa tête Stefan Kassel & Frank Lähnemann peut se targuer d’un précieux héritage pop, resté intègre jusqu’au bout. Et surtout d’une cohésion artistique exceptionnelle par la grâce de quelques noms illustres : Shack, The Pale Fontaines, Roddy Frame, Brent Cash, Starless… sans oublier le merveilleux disque hommage Caroline Now! à Brian Wilson.
Et puis donc le chalutier du magnifique David Scott, recordman définitif puisque Love and Other Hopeless Things restera son huitième pour le label hambourgeois (et son neuvième au total. Le songwriter originaire de Glasgow a trouvé une seconde famille dans la ville portuaire allemande, lui pourtant déjà issu d’une ville au patrimoine musicale légendaire (The Pastels, Belle & Sebastian, Camera Obscura, Teenage Fanclub …).
Rien ne ressemble plus à un album de The Pearlfishers qu’un nouvel album des Pearlfishers. On en convient, ainsi présenté sur papier, le lecteur pourrait craindre la redondance. C’est pourtant une autre affaire une fois cette musique enfin à notre portée auditive. Le capitaine Scott, seul membre permanent à bord des pêcheurs de perle (auteur, compositeur, musicien, chanteur, producteur, arrangeur…) maîtrise sur le bout de ses agiles petits doigts l’abécédaire de la pop de chambre, signé d’or aux côtés de ses contemporains Neil Hannon, Sean O’Hagan, Paddy McAloon et bien sûr le collègue Brent Cash… Love and Other Hopeless Things en est sa plus éclatante démonstration en date : élégance innée dans les arrangements de cordes et de cuivres, allégeance prêtée à Brian Wilson, Burt Bacharach, une certaine patine jazzy aussi… C’est un disque d’un raffinement absolu, aux mélodies délicates, irradiées de romantisme, mais relevant d’une science de l’orchestration précise qui n’est pas à la portée du premier venu.
Cinq ans après Open Up Your Colouring Book, ce nouvel album approfondit encore cette quête vouée par Scott de la Endless Harmony, ou pour d’autres la chanson pop parfaite… Peut-être l’a-t-il bien atteinte sur “Sometimes It Rains In Glasgow”, somptueuse ballade hommage à sa ville, qui nous transporte instantanément dans ces trottoirs perlés de pluie.. L’album laisse pourtant encore quelques splendeurs à découvrir, tel Once I Lived In London, co-écrit avec Bill DeMain (membre du duo américain Swan Dive), aux doux arpèges folk et ses harmonies enchanteresses élaborées sous l’égide de Jimmy Webb. Un instantané pop One For The Bairns tout en “Papapapa”… On remarque aussi quelques sensibilités latines plus prononcées en version cinémascope, Nino Rota et Ennio Morricone sur le splendide instrumental “A Woman On The Verge Of Becoming A Cyclist”. Une ballade nocturne aussi, superbe, A Walk Into The Blue Night, seul titre véritablement poignant de ce disque taillé pourtant pour fédérer la lumière. Ces chansons sur L’amour et ses choses désespérées renouent avec cet art perdu et précieux de la pop orchestrale de bon goût.
Marina Records – 2019
http://www.marinarecords.com/ma84.html
Tracklisting :
- Love & Other Hopeless Things
- Could Be A Street Could Be A Saint
- You’ll Miss Her When She’s Gone
- You Can Take Me There
- Once I Lived In London
- One For The Bairns
- A Walk Into The Blue Night
- A Woman On The Verge Of Becoming A Cyclist
- Sometimes It Rains In Glasgow
- I Couldn’t Stop The Tide
- Another Sunflower