Un premier album post-traumatique made in Brooklyn sombre et efficace


« Baladins post-traumatique », voilà le badge que pourrait arborer ce trio américain issu de Brooklyn. Avec ce premier album « containers » d’une excellente qualité, « The Wants » nous livre le fruit de trois années de travail.

Autoproduit, élaboré avec soin, minutie et inventivité il vient puiser dans les meilleures inspirations musicales de ces 30 dernières années, sans jamais travestir leur identité ou dénaturer la cohérence de leurs 12 morceaux.

Chacun y trouvera son référent, son « reminder ». On saluera pour l’occasion, Section 25, New Order, LCD Soudsystem ou encore David Byrne (Talking Heads) et The Fall. On passera ainsi sans forcer, de sonorités post-punk new-wave à de la synth-pop, tout en se laissant animer par des rythmiques electro sombres et minimalistes.

Le groupe est composé de deux membres du groupe new-yorkais Bodega, Madison Velding-VanDam et la bassiste Heather Elle, rejoins pour l’occasion par le batteur Jason Gates.

Les thèmes tournent autour du cœur sombre de l’Amérique et de toutes ses complexités. Et alors que chaque titre parle des luttes du consumérisme, du matérialisme, du surmenage, de l’anxiété et du stress qui culminent dans la confusion et la perte d’intimité et d’humanité, il en ressort pourtant à l’écoute un sentiment de légèreté.

Il se dégage une sorte de fumée certes grise et polluante, dont le visuel vaporeux et ondulant transforme une triste réalité en un tableau romantique et réconfortant.

Cet environnement dénaturé par la présence industrielle et pourtant poétique aux yeux de ceux qui n’ont pour seule et unique vision disponible que celle-ci, est très présent dans le travail de Madison Velding-VanDam.

Ces paysages sont ceux de son enfance passée à Detroit, qui au-delà d’être feu le reine capitale de l’industrie automobile américaine, pourrait être la capitale de la claustrophobie à ciel ouvert. Dans le titre très accompli « Ape Trap », on croit d’ailleurs entendre dans son démarrage ses machines-outils d’acier asservissantes.

The Wants nous délivre un message. Sans possibilité de faire autrement face à cette réalité industrielle, pour « s’auto-préserver », métamorphosons là en une œuvre d’art acceptable, en une ressource balayant la déprime. Transformons le noir en un révélateur de couleur, écoutons des basses profondes et austères pour laisser le vocal pop de nos troubadours flotter dans l’air et nous revivifier.

Le titre « Fear my society » en est une parfaite démonstration. Malgré ses paroles remplies de souffrance, son rythme et la voix douce de Madison laisse derrière lui un sillage rempli d’espoir.

Chez « The Wants », il y a du métier, du non conformisme mais tout est cohérent, y compris dans les premières vidéos produites par Madison Carroll. La couverture de l’album et ses boites de conserves sur fond colorés reflète elle aussi ce parti pris artistique et cette posture que le groupe semble avoir adopté.  On retrouve cet univers, ce décor industriel lamentable qui réussit pourtant à nous bercer, à nous berner ?

Container est un album riche qui aime être écouté en boucle, comme une mécanique bien huilée qui ferait les trois huit. Plusieurs morceaux instrumentaux comme « Ramp »  ou « Machine Room » viennent s’intercaler et renforcer le versant sombre de l’album. Certains y verront le moyen d’atteindre douze titres, si cette thèse est probable, elle nous aura au moins préservé de l’écoute de morceaux inaboutis ou hors-jeux comme on en dénombre trop sur beaucoup d’albums récents.

On retiendra pour finir la vigueur de « The motor » qui en moins de trois minutes nous rappelle si nous l’avions oublié, que la basse est l’une des plus belles invention pour réveiller le rebel qui sommeille en nous après l’invention de la moto. 

Une raison supplémentaire pour vous coiffer d’un casque et écouter cet album que vous allez rêver d’écouter sur scène, l’autre lieu où « The Wants »  sait parfaitement s’exprimer sans condescendance mais toujours avec force et talent.

Council Records/2020

https://thewantsnyc.bandcamp.com/album/container

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Tracklisting :

1.Ramp (2:12)
2. Container (3:15)
3. Machine Room (0:52)
4. Fear My Society (3:24)
5. The Motor (3:15)
6. Aluminum (3:30)
7. Ape Trap (2:54)
8. Waiting Room (1:12)
9. Clearly A Crisis (3:07)
10. Nuclear Party (3:14)
11. Hydra (2:32)
12. Voltage (3:05)