C’est pourtant simple à expliquer, ce douzième album de Woods est un retour salutaire à la source pop folk psychédélique, et une invitation au rêve.


Love is Love, nous chantaient Woods sur leur précédent album paru en 2017. En pleine élection présidentielle américaine, la formation new-yorkaise appelait à se mobiliser contre Donald Trump sur un slogan qui se voulait unificateur, “l’amour vaincra”. Mais le coeur côté inspiration, n’y était pas. Puis, les meneurs du groupe, Jeremy Earl et Jarvis Tarveniere, ont séparé quelques temps leur chemin : le premier a goûté aux joies de la paternité (et ses nuits courtes), tandis que le second a traversé les Etats-Unis pour s’installer en Californie. En 2018, tous deux se sont retrouvés pour collaborer avec Dungen sur un EP, puis pour produire le retour en grâce de David Berman, et son ultime projet Purple Mountains, avant que l’ex Silver Jews ne décide de disparaître tragiquement. Après cet épisode douloureux, il était temps pour Woods de revenir vers de bonnes vibrations.

Depuis Whith Light and With Love en 2014, le duo avait un peu mis de côté la pop folk / garage psychédélique qui avait fait sa renommée, pour des excursions krautrock et afrobeat. La pop bigarrée d’At Echo Lake (2009) et Bend Beyond (2011) n’était plus qu’un lointain souvenir, non sans regrets de notre part. Bonne nouvelle, Strange to Explain, 99e sortie du catalogue Woodsist, et 12e opus de la formation, renoue avec un format plus concis et mélodieux. Le premier extrait dévoilé début mars en annonçait la couleur, « Where Do You Go When You Dream? », une production chaleureuse (mellotron, Wurlitzer), un motif mélodique évident, et un refrain parfaitement amené. Voilà la définition d’un Eden boisé tel qu’on en rêvait depuis trop longtemps. 

Comme pour faire face à l’adversité de ce monde si confus, Strange to Explain se pose en disque échappatoire, plus précisément comme un disque d’évasion par le rêve. Plusieurs chansons évoquent ce thème de l’onirisme à grand renfort d’arrangements baroque (“Where Do You Go When You Dream?”, l’hispanisant “Just to Fall Asleep”, “Next To You and The Sea“), parfois escorté une section de cuivres comme sur l’interlude “The Void”. Sous des arrangement flirtant avec le grandiose façon Mercury Rev, “Can’t Get Out”, est le morceau le plus aguicheur de l’album. C’est l’un des titres les plus pop de leur carrière, mais qui ne cache pas cependant, derrière ses paroles impressionnistes, un appel de détresse, martelé dans son refrain. 

Bercé de délicates notes de xylophone, « Strange to Explain » (qui donne donc son titre à l’album), dénonce également le silence assourdissant d’une Amérique qui préfère tenir sa langue et ne pas retenir les leçons, ou plutôt les erreurs, de son histoire.

Sur « Light of Day », la voix de fausset inimitable de Jeremy Earl, saupoudrée de choeurs vaporeux, est aussi à compter parmi leurs plus belles réussites. Enfin, l’instrumental au relent soul, Weekend Wind, clôt l’album sur un solo de trompette enivrant de Jarvis Tarveniere, s’étirant sur près de sept minutes chimérique, appuyé autour d’une rythmique hypnotique. Une jolie conclusion avant de lentement sonner le réveille et le retour à la réalité. Allez, on y retourne.

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Tracklisting : 

1 Next to You and the Sea
2 Where Do You Go When You Dream?
3 Before They Pass By
4 Can’t Get Out
5 Strange to Explain
6 The Void
07 Just to Fall Asleep
8 Fell So Hard
9 Light of Day
10 Be There Still
11 Weekend Wind