Avant un retour au folk pour un album solo, Neal Casal s’octroie une escapade dans un répertoire musical. Ce power trio invite le funk, le boogie, la soul, le blues et le rock à swinguer sur une danse fiévreuse.
Where your rock’n’roll’s gone ? Comme entrée en matière, on ne ferait pas mieux. Cependant, cette question est reléguée en fin d’album. Comme quoi, Neal Casal sans faire nécessairement le bilan de sa carrière est conscient que le commerce de la musique sape tout sur son passage y compris les illusions des débuts. Another band in a million, Some people tell you that it’s just not fair They wanna know what I’m thinking, I’m thinking what do I care, I’m only in this for a good time. Et en effet, Neal Casal avec son groupe Hazy Malaze (accompagné de Jeff Hill et Dan Fadel) est là pour prendre du bon temps et nous en procurer. Il a compris depuis longtemps qu’il ne suffit malheureusement pas d’écrire de bonnes chansons pour attirer les lumières du succès. Ça se saurait si la notoriété était liée au talent. Le cirque du rock’n’roll et ses déceptions quotidiennes le prouvent chaque jour, de désillusions en désillusions mieux vaut faire de la musique pour le fun que pour la gloire.
Et Neal Casal l’a bien compris, se foutre du buzz et s’amuser avant tout, le reste suivra s’il doit suivre. Alors lui et ses musiciens prennent du bon temps mais avec un niveau d’exigence nécessaire. Rigoureux dans l’écriture, l’américain s’évertue à écrire des chansons qui tiennent la route et qui fassent danser le public. Et peu importe le style, la musique n’a pas de frontière. Ainsi Blackout love propose onze titres qui flirtent aussi bien avec le funk (« Everything »), le boogie (« Looking out for you »), le garage rock (« Dirty summer »), le blues (« Corrina ») emprunté à Taj Mahal, la soul (« Soul gets lost »), le reggae (« Need somebody »), que le rock (« Rock’n’roll Gone »). Autant de genres qui pourraient déconcerter à première vue l’auditeur, mais une fois le disque sur la platine, il produit son effet. Et vous voilà en train de bouger les épaules, remuer du bassin, taper dans les mains, reproduire les vocalises du chanteur aux rythmes des différents airs qui se succèdent inlassablement.
Pourtant à trop vouloir marier les genres dans un même album, beaucoup de critiques ont reproché à Neal Casal de se perdre dans un méli-mélo de genres musicaux, préférant ses escapades solo dans des révisions folk et blues. Même si ces jugements sont fondés – il est vrai que la cohésion de l’album peut souffrir du manque d’une propre direction – c’est aussi ce qui fait son charme, les albums de Hazy Malaze sont le reflet d’influences chères au chanteur. Aussi, une fois encore dans Blackout love, on retrouve une large représentation du patrimoine musical du compositeur.
Toutefois, bien que ce deuxième album du trio surpasse son prédécesseur avec une orchestration très soignée – d’ailleurs on conseillera aux apologistes des machines électroniques de jeter une oreille sur le disque (juste une guitare, une basse et une batterie suffisent pour créer une alchimie) -, certains morceaux comme « Got my wings », « Damage talking » ou « Bust it down » manquent peut-être de profondeur et auraient mérité un peu plus de désordre dans leur structure pour les rendre moins pompiers. Ceci est peut-être dû à l’urgence de l’enregistrement puisqu’en deux mois l’album a été mis en boîte alors que pour les premières prises en studio, la base de certains titres n’était pas encore construite.
Malgré ces quelques défauts, la dynamique du disque ne s’essouffle pas. Et elle le doit en grande partie à une rythmique impériale et à la voix du chanteur toujours aussi impressionnante, très soul. Ce n’est pas un hasard si les chansons font taper du pied. Pour s’en persuader rien de tel que d’écouter à fond les titres « Everything » et « Looking out for you », de véritables petites perles soniques. Ainsi, des tubes en puissance joués avec autant de simplicité et de spontanéité ne peuvent être qu’un gage de qualité.
Neal Casal en solo ou avec Hazy Malaze ne remplira sûrement jamais les stades et pourtant ses albums valent vraiment le détour.
-Le site de Hazy Malaze