Ce couple à la formation infaillible piano/batterie écrit actuellement les plus vives et émouvantes pop songs de la terre. Ils n’ont besoin de personne si ce n’est d’amour et d’eau fraîche.
« C’est un beau roman, c’est une belle histoire… c’est une romance d’aujourd’hui ». Ce saligaud de Michel F. m’ôte les mots de la bouche… cette musique immaculée ne peut être paradoxalement que le fruit d’une union sacrée. Installés sur les collines dominantes de San Fransisco, les Mates of States sont un duo mixte, mariés à la vraie vie. Paire inséparable, Kori Gardner (chant, clavier) et Jason Hammel (batterie) ont un autre amour qui les lie, la musique. Depuis maintenant dix ans, ils se produisent sous une formule rudimentaire : elle, chante des airs debout, caressant son orgue Wurlitzer, tandis que lui l’accompagne assis à la caisse claire, avec ses harmonies vocales doublées en canon.
Bring It Back, qui est déjà leur quatrième album, nous avait inexplicablement filé jusqu’ici entre les mains. Et l’on ne s’en remet toujours pas. Appuyé par Bill Racine à la production (Roguewave), leur songwriting est visiblement monté d’un cran depuis Team Boo en 2003. Cette dizaine de morceaux instantanés détient quelque chose qui nous désarme sans la moindre négociation. Car Mates of State, ce sont un peu les White Stripes de la pop : seuls contre tous, ils sonnent plus vivants qu’un bataillon de musicos réunis. Sous leur aile, on renoue avec l’impatience sucrée de Quasi (configuration oblige), on faiblit devant les harmonies brûlantes de feu Elk city. Mais par-dessus tout, on sent cette inclination pour quelques illustres nobles formations pop : Go-Betweens, Modern Lovers, les oisillons néo-zélandais de Flying Nun.
Mates of States a surtout conservé de ses pairs cette innocence, cette générosité dénuée de cynisme qui nous fait tant défaut dans notre société dite « civilisée ». Leurs chansons se veulent de facture simple mais témoignent de la rigueur mélodique d’un vieil artisan méticuleux, amoureux de son métier. Ils savent écrire des refrains intenses, qui vous poursuivent toute la journée. Leur engouement se révèle souvent contagieux, comme sur l’emballé “For the Actor” et même sur le plus solennel “Running Out” que ne renierait pas Ben Folds. Le triplé successif “Think Long”, “Fraud In The 80’s” et “Like U Crazy” compte parmi les moments pop les plus jubilatoires entendus ces derniers mois. On fond devant ses choeurs éclatants, ses claviers cheap brinquebalés sur des harmonies vocales qui s’enchevêtrent à la perfection (Jason Hammel a un filet de voix tellement aigu que l’on croirait par moment entendre une autre voix féminine). De toute manière, vous l’aurez compris, il n’y a pas grand chose à jeter sur ce disque.
Regardez, combien de groupes peuvent se vanter d’avoir écrit leur meilleur album à partir de la quatrième passe ? Les Beatles, Les Smiths, les Go-Betweens, et puis ? Les mates Of States font partie de cette race en extinction. En plus, un groupe qui remercie dans le livret « tous les gens qui continuent de faire de la musique honnête » mérite qu’on s’y attarde. Le geste est naïf et touchant, mais on a envie d’y croire. A fond.
– Le site de Mates of State
– Sur myspace