Un nouveau quatuor au centre du monde, New York. Des sangsues sabbatiques qui croquent sans vergogne dans l’indie pop, l’Afrique, la new wave et quelques autres incongruités pour remplir leur marmite. Facile de devenir mordu de ces vampires.


L’album tombe tout juste dans les bacs, et pourtant, écrire dessus donne l’étrange impression d’avoir un train de retard. Et pour cause, portés aux nues par les hautes institutions de la blogosphère et des revues à la pointe de la « coolitude », les coqueluches du moment ont volé la vedette aux Shins, font copains-copains avec les Dirty Projectors et posent dans des bibliothèques, une encyclopédie à la main. Soyez jetés aux flammes si vous l’ignoriez, Vampire Weekend est le nouveau meilleur groupe du monde, avec toute la mauvaise foi et dose de superficialité que cela sous-entend…

Difficile d’échapper aux rouages de la machine médiatique lorsque celle-ci est lancée. Avec leurs gentilles mélodies à la fièvre sous-jacente, nos quatre « graduates » de l’Université de Columbia (New York) n’ont probablement pas souhaité attirer autant d’attention et de superlatifs autour d’eux. Dans tous les cas, leur petit terroir musical n’a pas ambition à faire trembler les stades, tout juste parviendraient-ils à décrocher le lustre du plafond – celui en l’occurrence de la pochette. Le quatuor aux (fausses) dents longues aspire avant tout à écrire de bonnes petites chansons informelles de 2 minutes 30 sec. Emballé, c’est pesé ! Seul vice, une drôle de propension à brouiller les pistes, et ce depuis leur toute première démo. Tomber à l’improviste sur “Cape Cod Kwassa Kwassa” campé derrière ses guitares zoulou zélées, son groove exotique et son charme scolaire fait son petit effet déroutant.

Ils s’amusent à faire rimer leur refrain avec Peter Gabriel mais c’est Paul Simon qui aurait carrément mérité cet honneur, pour Graceland, son chef-d’oeuvre solo, influence flagrante ici. Peut-être répareront-ils cette injustice sur le prochain album… On suppose tenir le dernier avatar pop des Talking Heads provenant de la Grosse Pomme après les fusions afro-rock de Yeasayer et des indomptés d’Animal Collective. Mais attendez un peu, l’album réserve encore quelques ruses de désorientation…. Car il faut le répéter, si Vampire Weekend se dévoue à la pop, le quatuor ne fait pas de ségrégation musicale, associant au gré de ses humeurs et sur le même support le ska, la new wave, le rock estudiantin des Feelies et même la sunshine pop de The Millenium.

Est-ce que Vampire Weekend mérite le qualificatif de génial ? Ce serait exagéré, mais leur premier album apporte sans conteste un peu de fraîcheur. Tout ce qu’ils se réapproprient paraît facile à leur contact, mais bien embarrassé sera celui qui devra les caser dans une famille musicale – si ce n’est celle de la pop. Quoi de plus déstabilisant que d’écouter “M79” avec son clavecin et ses nobles violons vénitiens après la tranche d’exotisme offerte par “Cape Cod Kwassa Kwassa” ? Plutôt culotté que d’aligner ces deux morceaux à la suite ! Roublards sur les bords, Ezra Koenig (chant / guitare), Rostam Batmanglij (claviers), Chris Baio (basse) et Christopher Tomson (batterie, percussions) s’essaient sur une même partition au mellotron et au clavecin, supportés par une rythmique afro et des steel drums (casseroles). Prenez “One (Blake’s Got A New Face)” qui s’emballe sur un tempo punky effréné enroulé de ses violons chourrés à “Eleanor Rigby”, ou encore “Walcott” et son piano bastringue, flanqué en plein milieu d’une bagarre de saloon… Que de dépaysement ! Au fond, ils n’inventent rien, ils réinventent, toujours avec une approche ludique contagieuse. Méfiez-vous, les vampires n’ont plus peur de la lumière du jour.

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