L’ultime sélection de la Pinkushion Team, ou comment dresser un panorama non exhaustif de l’année écoulée à travers une vingtaine de disques à ne pas oublier.
À l’heure de dresser le sempiternel bilan annuel, il s’agit moins de tirer un trait définitif que de repérer les divers jalons et axes musicaux par lequel ce dernier aura cheminé — et nous aura fait cheminer — au cours des douze derniers mois. Et de confirmer alors ses primes impressions ou, au contraire, de réviser son jugement a posteriori. De toute évidence, 2010 nous aura permis de vérifier deux ou trois choses pressenties quant à la qualité et l’importance de quelques groupes déjà plébiscités dans nos colonnes, plutôt que de nous révéler des découvertes foudroyantes (aucune première œuvre dans notre sélection). Si plusieurs albums (ceux de Sufjan Stevens, Joanna Newsom, Philippe Katerine, Arnaud-Fleurent Didier) ont été l’objet, en interne, de débats enrichissants, la fidélité, tout sauf aveugle, portée à un groupe ou un musicien n’en demeure pas moins à être considérée à sa juste valeur, d’autant plus à une époque où la loi de la nouveauté semble trop souvent dominer les esprits. À cela, ajoutons que la pluralité des musiques retenues ici reflète la diversité d’un territoire musical contemporain, aux frontières particulièrement poreuses, qui n’a de cesse d’occuper la curiosité vagabonde de nos plumes.
Midlake
« The Courage Of Others scintille de mille feux, à la condition unique de s’y attarder, de s’y plonger corps et âme, et d’accepter de s’y perdre.
The Walkmen
– Lisbon
« C’est en fait une descente vers les racines du blues et du rock’n’roll, fanfare qui tangue sous le soleil pour soutenir ce chant éraillé. »
Arcade Fire
« La jeunesse évadée, l’homme vidé de sa substance ne valent plus rien et attendent une “Surburban War”, comme le chante Butler dans la magistrale ouverture. »
Wolf Parade
– Expo 86
« Onze déflagrations rock, terrain de mutations complexes et totalement débridées, où tentent de cohabiter deux genres antagonistes – guitares post-punk et claviers rétros, limite Texas Instrument. »
Women
« Nous savons exactement ce que nous faisons, mais en même temps il y a un élément d’imprévu, spontané, qui compte beaucoup dans notre musique. » (Patrick Flegel)
Sun Kil Moon
« L’égal contemporain des plus grands, quelque part entre Nick Drake et Neil Young. »
Philippe Katerine
« Après Robots après tout, Katerine radicalise son approche d’une musique en apparence aussi bête que son cul, mais en réalité génialement jouissive et subversive. »
Sufjan Stevens
« L’irrépressible envie de réécouter encore l’album – d’une part pour vérifier l’adage « Ne pas en croire ses oreilles », de l’autre pour jouir à loisir d’un disque dont le discours n’est qu’un encouragement à rompre les habitudes, une ode à la liberté d’oser (…) »
Ariel Pink’s Haunted Graffiti
« L’imagination constamment en surchauffe, Ariel Pink se fait inventeur de mille combinaisons différentes et de savoureux mélanges de sonorités troubles qui rendent sa musique une des plus excitantes du moment. »
Joanna Newsom
« Alors que les saucissonnage et zapping musicaux bâtent leur plein, l’extravagante Californienne redonne à l’écoute dans la durée toutes ses lettres de noblesse avec un triple album d’une grande maturité artistique sur les affres du désir. »
Kanye West
– My Beautiful Dark Twisted Fantasy
« Véritable fresque hip-pop, le cinquième album de Kanye West est aussi son meilleur paru à ce jour : un condensé explosif de sons abrasifs et vivifiants, admirablement produit, qui embrase et embrasse des décennies de musiques tous azimuts. »
Plants and Animals
« Une acuité dramaturgique exceptionnelle traverse l’album de part en part ».
Swans
– My Father Will Guide Me Up A Rope To The Sky
« Retour au sommet pour le groupe de Michael Gira, habité et hanté comme jamais, qui sonne l’heure de l’apocalypse sans se brûler les ailes. »
Eleh
« L’intensité qui s’y maintient, avec cette stabilité manifeste et épaisse, rend caduc tout espoir d’y découvrir un point d’origine. »
Oneohtrix Point Never
– Returnal
« La musique de Oneohtrix Point Never travaille profondément son auditeur et cela d’une manière répétée, comme si chaque humeur y trouvait son compte différemment et singulièrement selon le contexte. »
Gorillaz
« Gorillaz n’en finit pas d’exploser les carcans, concasser les styles et atomiser les codes pour livrer une musique d’une intelligence extrême sans perdre son côté ludique. L’oeuvre d’un grand homme, assurément. »
Jeremy Jay
– Splash
« Se succèdent pauses fragiles et instants incandescents, qui voient le jeune homme tenter par moments des uppercuts et des crochets du droit, venant inévitablement mourir dans un oreiller de plumes. »
Arnaud-Fleurent Didier
« La Reproduction n’assène pas de réponses, préfère emprunter des pistes expressives sinueuses, où le doute le dispute à l’espoir et le désabusement à l’ivresse. »
Frightened Rabbit
« Frightened Rabbit se distingue des autres groupes du genre par une odeur de sueur sur des nippes mal découpées. »
French Cowboy
– (Isn’t My Bedroom) A Masterpiece
« French Cowboy fait aujourd’hui largement oublier les premiers pas de ses membres, autant que sa principale chapelle, et s’affirme comme un groupe essentiel. »