Dixième album (déjà!) du collectif néocountry dirigé par l’ex heavy metalleux Jason Molina. Le groupe phare du label Secretly Canadian propose toujours le même avoir-faire et bonifie sa formule avec le temps, avec un chouillas d’émotion qui pourrait bien faire la différence cette fois-ci.
La somme pléthorique d’albums sortis depuis six ans par Jason Molina sous le pseudo Songs : Ohia ou autres (Songs: Albian, Songs: Radix et Songs: Unitas) ne trompe pas pourtant sur la marchandise du bonhomme. Le résultat est, en gros, toujours le même, à savoir une néocountry que l’on a souvent comparé à Palace, agrémentée d’un accent neilyoungesque 70’s bien avancé. Des remarques qui ont souvent penché en sa défaveur d’ailleurs. Visiblement, Jason Molina semble autant prendre en considérations ces reproches que son peu d’intérêt pour la dernière vague électro à la mode. Et c’est temps mieux !
Songs : Ohia use du même principe artistique que Will Oldham en s’acoquinant avec d’autres musiciens pour chaque nouvel album (remember The Lioness avec les Arab Strap, voir aussi justement avec l’ex-maestro de Palace). La seule différence notable, c’est que les musiciens de sessions réquisitionnés sur The Magnolia Electric Co, se sont mués en un réel collectif. En plus d’avoir fait appel à Steve Albini pour ces talents d’alchimiste du son, Jason Molina s’est aussi entouré d’une tribu de neufs musiciens (dont trois chanteurs) à rendre jaloux la chorale dévergondée de The Poliphonic Spree. Enregistré dans des conditions quasi « live », et de main de maître donc par Steve Albini dans son Electrical Audio Studio à Chicago, l’orchestre présent ici est la même que sur l’album live Mi Sei Apparaso Come Un Fantasma Italian(2001). Mis à part les habituelles interventions féminines, Molina laisse Lawrence Peters s’époumoner sur un titre « The Old Black Hen », mémorable de retenu, à mi-chemin entre Fairport Convention et Graham Parsons.
Dès les premières notes de lap steel sur « Farewell Transmission » on sait que l’on naviguera dans les eaux americana bien balisées. Le bottleneck trace son chemin et nous accompagne dans notre périple tout au long de ce disque. L’ensemble oscille entre ballades flokloriques et morceaux mi-tempo marécageux. Sur « I’ve Been Riding with the Ghost », la voix de Molida est troublante de ressemblance avec le « Loner », si bien que l’on jurerait avoir affaire à un inédit de première facture. Le reste des titres chantés par le maître des lieux est du même acabit. Sur « John Henry Split My Heart », la Lap Steel se fait plus rugueuse et fait communion avec les riffs tordues des Les Paul. « Hold On Magnolia » termine l’album sur une note plaintive, le long de sept minutes mêlant étroitement guitare claire, violon soliste et toujours cette lap steel poignante et inspirée.
Certains vont crier au plagiat sans vergogne, d’autres verront en Jason Molina un songwriter doué, capable de rivaliser sur le même terrain que Neil Young période Tonight’s The Night et Zuma. A l’heure où la carrière du vieux Young commence à s’essouffler (enfin, il nous a déjà fait le coup à la fain des années 80, puis à sorti coup sur coup une torché de chef d’oeuvres…) et que son coffret rétrospectif se fait toujours attendre, The Magnolia Electri Co semble une alternative idéale. D’autant plus qu’on a certainement affaire à un des meilleurs albums dans le genre. Ce qui n’est pas une mince affaire, vu le poids assommant de l’héritage.