Gardien du temple de l’école american primitive, le vétéran de la six-cordes folk Glenn Jones perpétue merveilleusement la tradition. Un touché limpide et mélodique, toujours exécuté avec brio.
Fleeting, sixième opus du guitariste américain Glenn Jones, respire le calme et la sérénité. Dans le plus simple appareil – guitare acoustique et banjo – ce virtuose modeste de la six cordes déroule dix vignettes instrumentales resplendissantes. Son jeu est vif mais coulé, on imagine ses longs doigts agiles manipuler avec maestria sa guitare.
Jones fut aussi en son temps passeur de sons plus complexes et éruptifs. Ses laboratoires d’antan résonnent encore des expérimentations sonores pratiquées : du rock expérimental des Shut Up au milieu des années 80, au post-rock de Cul de Sac dans les années 90.
Sa passion pour la musique électronique, le psychédélisme et le rock est officiellement abandonnée en 2004. Sous son propre patronyme, il privilégiera l’épure. Adepte et maître de l’American Primitivism, il se rallie à l’acoustique, à son amour pour les accords ouverts (accordage non standard de la guitare) et à la technique du fingerpicking. Glenn Jones s’en affranchira ensuite en inventant son propre schéma d’accords personnels et complexes.
Fleeting est enregistré sur sa terre natale du New Jersey sur les rives de la riviére Rancocas Creek. A l’instar de My Garden State en 2013, Laura Baird est à nouveau aux manettes. Sa conception débute pourtant dans la difficulté. Deux jours et 24 prises seront nécessaires à l’éclosion du méditatif et magnifique “Flower Turned Inside-Out”. Mais on imagine cette étape comme un déclic et la suite, comme par enchantement, aller naturellement de soi.
Ce retour à ses racines sonne comme un regard intérieur : sa famille, ses amis et ses influences trouvent un écho dans ses compositions.
L’inspiration et le savoir-faire sont au diapason. La technique – évidente – s’efface sagement au profit de l’émotion. L’écoute magnifique de Fleeting est conseillée à tous les flippés des temps modernes. Inspirée, la musique de Glenn Jones parle pour elle-même. Elle nous raconte des histoires muettes mais jamais ennuyeuses. Ce récital est organique et magnétique.
Proche de la nature, Jones trouve un équilibre naturel dans ses compositions et retranscrit une quiétude bienveillante. Entremêlés à la musique, on perçoit clairement en contrepoint de certains morceaux, des chuchotements d’oiseaux, le coassement de grenouilles ou bien le bruissement d’une chute d’eau. Le ressenti est très positif.
Enroulé dans cette bulle musicale, résonnant d’arpèges de guitares contemplatifs, notre esprit se relâche, et emprunte un chemin, fait de circonvolutions tranquilles et bucoliques.
Sur Fleeting, Glenn Jones fait encore une fois sienne l’affirmation de feu son vieil ami Robbie Basho « Soul first, technique later« , (auquel il rend d’ailleurs hommage sur le vibrant titre « Portrait of Basho as a Young Dragon »). Finalement tout se résume à cela.
Glenn Jones donnera un concert unique en appartement, le dimanche 1er mai prochain, à Paris, en compagnie du virtuose Daniel Bachman. Pour plus de détails, aller à la page Facebook de l’événement (réservation obligatoire via [email protected])
Ecouter l’album en intégralité sur le site de Thrill Jockey