Désormais plus dans le cosmos que cosmique, la paire parisienne passe orfèvre en mélodies gravitationnelles. Ils ont vu le futur, et nous l’avenir.
Il y a une certaine fierté d’entendre des disques de cet acabit. Ce n’est pas vraiment une surprise pour nous mais autant le souligner encore une fois, il n’y a pas qu’au cinéma que la France brille internationalement ces temps-ci. Le rock en France aussi se porte très bien. Qu’il s’agit ici précisément de la nouvelle offensive du passionnant label parisien Clapping Music, ou d’autres formations sévissant aux quatre coins de l’hexagone tels que Maison Neuve, Mina May, Kim Novak et Mars Red Sky, chacun dans son domaine respectif contribue à rendre l’époque excitante en république dite de l’exception culturelle.
The Echo Show est le second album de Yeti Lane. Quand bien même, c’est surtout celui d’un groupe réinventé. Réduit au format duo après leur premier album, l’ancien trio n’a cependant rien perdu en chemin de son envergure sonique. Question puissance, la bête mythique en ressort même décuplée. La paire indéfectible Ben Pleng (voix et guitares) et Charlie B (claviers, batteries), déjà dans une autre vie distingués chez feu Cyann & Ben, ont repensé leur vision musicale. Repousser les perspectives mélodiques via des agencements harmoniques élaborés, voire déviants. Les claviers psychédéliques 60’s qui baignaient le premier album se sont particulièrement dilués, laissant place sur The Echo Show à de nouvelles textures rétro-futuristes, une monochromie plus saillante pour les excursions krautrock au pays des « Man-machines » organiques.
Une esthétique dense et sophistiquée accomplie avec l’apport d’un troisième homme de l’ombre, Antoine Gaillet, ingénieur formé à bonne école avec la synth pop de M83 et Zombie Zombie, paire d’as du rock choucroute made in France. Autant dire que le jeune producteur parisien maîtrise parfaitement les codes de la mélodie synthétique tordue, et s’y prête à chœur joie sur notamment « Faded Spectrum », pièce épique et inquiétante distendues sur 6 minutes 45 secondes.
Pour avoir une idée de ce que Yeti Lane a dans le coffre aujourd’hui, l’écoute en premier lieu de « Dead Tired » et « Warning Sensation » est vivement recommandée : collision fantasmée, The Soptware Slump meets Radioactivity, comme si Jason Lytle de Grandaddy (la voix berceuse de Ben en est proche) prenait pour backing band Kraftwerk. Autre singularité déversée en ces plages, celle de « Alba » étrange sonde lacrymale visitant des abysses inexplorés de la pop mélancolique.
Aussi sensationnel soit-il, le riche programme de The Echo Show serait incomplet sans souligner « Analog Wheel », premier single annonciateur de cette mue de pleine lune. Calé en première piste, cette impressionnante pièce-montée où synthés glaciales et guitares en combustion shoegaze s’imbriquent diaboliquement, gravit des sommets harmoniques sur quasi huit minutes. C’est durant cette ascension qu’on mesure le long chemin parcouru par l’insécable binôme parisien. Les empreintes du Yeti sont encore fraiches mais vont indubitablement laisser des traces indélébiles.
Le single « Analog Wheel » à télécharger :