Avec le retour imminent du meilleur groupe de Liverpool (après les scarabées bien sûr), il est grand temps de réhabiliter un des albums les plus oubliés de l’histoire de la pop anglaise : Zilch, premier album de Shack. Il faut dire aussi que la guigne légendaire des frères Head n’a pas vraiment contribué à faire connaître davantage ce bijou de mélancolie pop, qui à férocement et étonnament résisté à l’érosion du temps.

La discographie de Shack étant plutôt pauvre (quatre albums en quinze ans d’existence), il est important d’insister sur le fait que tout fanatique de mélodies surréelles se doit d’avoir au moins deux albums de Michael Head dans sa collection personnelle (n’étant pas objectif dans ma démarche, je vous laisse choisir au hasard les dits albums). Composé entre 1986/87 après la dissolution des Pale fontains, Michael Head – alors seul à bord – décide d’intégrer définitivement son frère John dans le processus créatif. De cette collaboration naîtra Shack, formation plus orientée vers une pop classique.

Comme l’explique si bien celui considéré comme le plus grand espoir pop des années 80, dans le livret de l’album réédité en 89 : »Zilch forme le lien artistique et personnel entre les Palies et le nouvel album qui est en train d’être enregistré (ndlr : Waterpistol). » Manque de pot toujours, le second album de Shack verra finalement le jour sept ans plus tard ! Guigne quand tu nous tiensÂ…

Totalement passé inaperçu à sa sortie en 1988 pour cause de promotion quasi-inexistante et un label en plein dépôt de bilan, Zilch est réédité l’année suivante dans l’espoir de lui redonner une seconde jeunesse. Rien n’y fera, la critique lapidaire finira de sceller au plus vite le destin de cet album (je me rappelle la chronique des Inrocks qui n’y allait pas de main morte).

Alors pourquoi autant d’acharnement? S’agit-il là d’un mauvais album? En vérité, la presse n’a pas encaissé cette nouvelle formule moins originale que celle proposée par les Pale Fontains. Certes, le groupe des Frères Head a omis d’inclure des trompettes et autres ambiances bossa si caractéristiques du charme de Pacific Street, mais l’art du songwriting de Michael Head est toujours là. Et quelles chansons! Avec Ian Broudie à la production l’ensemble sonne plus brut de décoffrage : finis les super productions de l’ordre de « Thank You ». Sur Zilch, ce sont des lignes de guitares d’une pureté rare qui nous transportent vers la galaxie des Byrds, Kinks et autres géants de la pop sixties. Les orchestrations refont leur apparition à certains moments (le très Lotus Eaters « High Rise Low Life » ) mais la surenchère et la côté ultra-léché des oeuvres précédentes est laissé de côté.

Avec ce choix volontaire d’une production plus sobre, les frères Head signe là leur album le plus intimiste et touchant. Il en découle une sincérité et une justesse proprement unique. La voix du grand frère n’a rarement sonné aussi juste, et lorsqu’il chante une enfance nostalgique de banlieusard et autres amours perdus, on ne peut que s’agenouiller devant une telle grâce. Sommet de l’album, « John Kline », bouleverse de fond en comble l’auditeur et j’avoue qu’encore aujourd’hui, j’en ai toujours la chaire de poule dès que j’entends les premières notes. Finalement, le seul véritable handicap de cet album est peut être de contenir deux ou trois titres un peu faibles (et encore, par rapport au contenu général). Mais si l’on connaît bien la discographie de ce groupe, on sait que les albums des Pale Fontains n’ont jamais véritablement été parfaits de bout en bout.

Complètement tombé dans l’oubli et introuvable depuis plus de dix ans, espérons que le grand retour de Shack profitera à un petit label pour rééditer ce magnum opus. Enfin, je jetais récemment un coup d’oeil sur les enchères chez E-Bay: l’album se négociait jusqu’à 80 livres ! Preuve que la qualité n’a pas de prix et que l’amour d’un disque perdure malgré tout le malheur qui peut s’abattre sur lui.

Tracklisting :

1. Emergency 3:30
2. Someone’s Knocking – 3:52
3. John Kline – 3:45
4. I Need You – 3:24
5. Realization – 5:55
6. High Rise Low Life – 3:40
7. Who Killed Clayton Square – 3:34
8. Up Against It – 4:34
9. What Is Like? – 3:06
10. The Believers – 3:43
11. Liberation – 3:08
12. Faith – 3:19
13. High Rise Low Life (remixe)- 5:17