Tout commence en 1978 lorsque un jeune australien de 22 ans décide de monter son groupe en réaction à celui de deux étudiants rencontrés à l’université de Brisbane, Grant McLennan et Robert Forster. A l’écoute des démos des Go-Betweens, Peter Milton Walsh réalisent alors que ses chansons ont plus de caractère et pour le prouver part à la recherche de musiciens. En choisissant le nom de The Apartments, Walsh exprime son attirance pour les grandes villes, la vision new-yorkaise d’un adolescent habitant la banlieue de Sydney qui rêve de lumières étoilées. De cet isolement, Peter en fera un atout en se plongeant dans la lecture mais surtout en découvrant la musique de Dusty Springfield, Bob Dylan, Sinatra, Les Stones, Les Walker Brothers, influences qui rejailliront dans ses compositions.

Sorti sur le label des Go-Betweens Able en octobre 1979, le ep The return of the hypnotist malgré son faible tirage à cinq cents exemplaires, reçoit un bon accueil dans la scène pop rock australienne. A partir de là, les démons du rock vont envahir la vie de Peter Walsh. Tout d’abord, les membres du groupe se déchirent dans la dope. « Sunset hotel » parlera de ce lieu où ses musiciens allaient chercher leur héroïne. Peter Walsh claque la porte et part tout d’abord à New York pour rejoindre Robert Vickers en tant que guitariste des Colours puis direction Londres pour assurer la basse des Laughing Clowns, groupe formé par Ed Kuepper, ancien guitariste des Saints. A l’issue de la tournée australienne pour promouvoir l’album Law of Nature, Peter Walsh rentre à Sydney et tombe dans un début de dépression.

Partagé entre l’alcool et les échecs amoureux, et une vie de dérive entre quatre coins du monde, huit années se sont écoulées entre l’album the evening visits… and stays for years (1985) et Drift (1993). Sans Steve Kilbey des Church et Greg Atkinson, redonnant confiance à Peter Walsh de composer, Drift n’aurait pas vu le jour.

Il a déjà été écrit mais on le répète encore Drift fait parti de ces chef d’œuvre qui nous hante encore aujourd’hui comme les 16 lovers lane, Pacific Street ou The Queen is Dead.

Drift est un album où on perçoit les fantômes de l’Angleterre lorsque Peter Walsh y vivait encore, cette lumière sombre qui étouffe et déprime. Drift est le reflet de la vision de la vie (noire) de Walsh, de ses angoisses, des rêves abandonnés, de la fuite. « The goodbye train » est une chanson écrite comme un signe de désespoir, une obsession par les excès, un adieu aux constants voyages qui nous dépossède d’amis, de famille, de maison. « Mad cow » alors chanté par Greg Atkinson est le cri d’un homme seul, désespéré, blessé.
« On every corner » de par son rythme soutenu se cogne contre les angles. « Could I hide here? » est à l’image de son chanteur errant dans une ville anonyme à la recherche de réconfort. « What’s left of your nerve » construit autour de la guitare possédée de Greg recrache le venin inscrit dans la chair, les lèvres sèches à force de s’époumoner au fond d’un puit.

Depuis 1997 et l’album Apart Peter Walsh n’a plus donné signe de vie. Il a dû retourner travailler dans son restaurant de fish&chips, jouant le soir des chansons à ses amis en pensant peut être réenregistrer un jour un album. On pourrait parler des heures durant de l’injustice de l’industrie du disque mais est-ce que cela servirait vraiment? Et puis tout compte fait qui voudrait partager son jardin secret avec des gens qui ne connaissent rien à la dérive des chansons? The Apartments ou une valeur inestimable.

THE APARTMENTS – Drift (réédition chez Talitres augmenté de deux inédits)

Tracklisting (Torn&Frayed/New Rose – 1993) :
Goodbye Train – On Every Corner – Mad Cow – Nothing Stops It – Over – Knowing You Were Loved – Places Where the Night Is Long – All His Stupid Friends – Could I Hide Here? (A Little While) – What’s Left of Your Nerve