Le groupe le plus méconnu de Glasgow rempile après huit longues années de silence discographique. L’aphrodisiaque n’a pas disparu, on se sent léger comme une plume devant tant de délicatesse.


L’Arlésienne ! Et dire qu’on attend ce disque depuis 1996… on n’y croyait presque plus à vrai dire. Dans un environnement où les modes se font et se défont, cela peut sembler une éternité. Mais attention, on ne range surtout pas nos lascars dans la même catégorie bouseuse qu’Axl Rose, Meat Loaf, et toute cette clique-là. Non, les Trashcan Sinatras, c’est du caviar en barre, de la poussière d’étoile, de la poudre blanche pure à 99,99%. L’extase pour tout amateur de pop digne de ce nom. Et pourtant, malgré cela, le secret honteux qui entoure ce groupe est tout bonnement incompréhensible.

On se demande, comment face à tant de galère les Trashcan Sinatras ont résisté à la séparation. Peut-être est-ce dû à sa fervente communauté de fans ? Ou bien tout simplement l’envie faire perdurer ses pop songs généreuses et d’une sincérité sans bornes. Trois albums dont deux indispensables, I’ve Seen Everything (1993), chef d’oeuvre de pop sensible à l’égal niveau d’un Vauxhall & I du Moz, pas moins. Puis Happy Pocket (1996), moins tourmenté mais toujours aussi lumineux. Et puis le destin a voulu que le groupe se retrouve sans contrat après la déroute du label Go ! Discs. Huit longues années de flottement indécis (un seul single en 1999, un contrat bancal au japon suivi d’une poignée de concerts à Tokyo et quelques cd live vendus par correspondance via leur site …) le quintet voit apparaître peu à peu le bout du tunnel en décrochant un contrat chez Spinart, porte ouverte à l’enregistrement de ce miraculeux quatrième album.

Enregistré à Glasgow entre mars 2002 et janvier 2003, les sessions d’enregistrement à rallonge laissaient présager quelques doutes sur l’aboutissement du disque. Et puis courant novembre 2003, certaines plages sont remixées par Andy Chase (du groupe Ivy) à New York. Plus de doute n’est possible, les lads sont de retour !

Et cela commence sous les chapeaux de roue : “Welcome Back” est un salut amical, une sorte de telex envoyé aux fans pour revendiquer haut et fort qu’ils sont bel et bien en bonne santé. Son côté rentre-dedans pourtant tranche avec le reste du disque, bien moins tapageur, d’une douceur que l’on ne soupçonnait plus à vrai dire. “Got Carried Away” est une comptine à la beauté incandescente, aussi pure que du cristal. C’en est presque rebutant à la première écoute, et puis on se laisse happer par tant de délicatesse, de mélodies fines, on y revient et on revient sans cesse.

“Freetime” nous rappelle les envolées fameuses d’ I’ve Seen Everything, au-delà du côté un peu niais des paroles, célébration d’une belle journée de printemps. Mais le plat est tellement bien présenté qu’on le déguste tête baissée. Et puis il y a la voix intacte de Francis Reader, interprète fantastique qui semble vouloir vous dévoiler ses tripes chaque fois qu’il prononce un mot.

On retrouve également quelques vieilles connaissances, comme Leave Me Alone (un titre réhabilité qui date de 1999) qui s’ouvre sur une wha wha funky digne du grand Marvin Gaye. Au bout du compte, les moments de bravoure sont nombreux et cette pop est tellement travaillée qu’il est impossible qu’elle soit délaissée comme un vulgaire hamburger.

Teinté d’un titre ironique (Weightlifting, haltérophilie en anglais), les Trash Can Sinatras n’ont pourtant jamais joué les gros bras. Juste une bande de copains qui se fait plaisir et nous aussi réciproquement, on les sent heureux d’être là, de partager ce moment privilégié après tant de galères. Cela crève l’écran, comme on dit. Les Trashcan Sinatras sont toujours là, et cela suffit à nous rendre heureux.

Le site officiel des Trashcan Sinatras