Débarqué du froid scandinave, ce groupe enflammé crie haut et fort des refrains fédérateurs. Quelques pirouettes pop mémorables, malgré quelques réflexes prévisibles.


Entre Shout Out Louds et votre humble serviteur, c’est l’histoire d’un rendez-vous maintes fois reporté – bien que tôt ou tard on savait que nos chemins se croiseraient forcément. Pour l’anecdote, ce disque traîne depuis un an dans les bacs import du Virgin Megastore des Champs-Elysées. En habitué des promenades du dimanche sur l’avenue du Drugstore, on a souvent croisé cet intrigant visuel aux couleurs marsiennes, vague réminiscence d’une pop néo-romantique 80’s (Smiths, Housemartins, Atzec Camera, Go-Betweens…). Serait-ce un classique méconnu passé sous notre nez ? Visiblement, pas même les vendeurs n’avaient remarqué l’intrus dans les rayons, incapables d’éclairer nos lanternes sur cet ovni. On a même failli le ramener à la maison, tiens, perturbé par cette pochette qui nous inspirait tant confiance. Aussi, lorsque le hasard nous a guidé à nouveau vers lui récemment, notre sang n’a fait qu’un tour : « Bon sang, mais c’est bien sûr, voilà mon vieux copain du dimanche ! ». Nous allions enfin percer le terrible secret de Shout Out Louds.

Shout Out Louds est une bande de musiciens suédois constituée de quatre garçons et une fille et dont les prémices datent de 2001. Les vertus transfrontalières de l’UE, tant vantées par nos politiciens, n’ont pas eu grand effet sur ce groupe talentueux, car ce premier opus végète depuis trois ans dans le port de Stockholm, attendant patiemment de prendre le large pour accoster sur nos rives. C’est finalement vers EMI qu’ils ont battu pavillon. Signature chez major oblige, ils en ont profité pour parfaire leur album avec les EPs sortis précédemment.

Leur patronyme donne tout de suite la couleur de leur musique : exaltée. Classés dans cette catégorie d’adjectifs, les plumes rock ont vite fait de les rallier avec la nouvelle référence en la matière, les flamboyants Arcade Fire. Faute de modèle de cet acabit en 2003, on imagine que les critiques suédoises les auraint rapprochés d’un Grandaddy cheap et juvénile (mais déjà avec barbe), la pop brûlante des compatriotes Wannadies ou encore quelques icones 80’s citées plus haut.

Howl Howl Gaff Gaff est un disque subversif, doté d’un flair pop indéniable et donc bien capable de déchaîner des passions. Quelques défauts subsistent tout de même… Bien qu’inventif, il faut concéder que leur rock trop vert pour l’instant n’a pas la singularité d’un Wolf Parade… mais leur ferveur et la qualité constante de leur pop joue en leur faveur. Cette pop sautillante, diablement additive, ne peut s’empêcher de trotter dans nos têtes avec un autre air de « déjà vu ». Pour exemple, le refrain revanchard de “Very Loud” lorgne personnellement trop vers les intonations d’un Perry Farrel pour que l’on plonge de plein gré.

Cependant, nos crieurs savent également manier le fouet et laisser de belles cicatrices à grands coups d’hymnes vaillants (“The comeback”). On batifolera sur la verve d’un “Oh, Sweetheart”, dont les noeuds de guitares s’entremêlant sur de fières cordes synthétiques donnent tout sauf des fourmis. On sent que les Shout Out Louds ont envie de tout donner, de foncer tête baissée sans détour et c’est leur atout majeur. Ce trop plein d’émotion engendre souvent une chute morale brutale. Sur l’écrasant et magnifique “Go sadness” (mais on jurerait entendre Jason Lytle faire les choeurs… motus !) nos pourfendeurs d’émotions, lessivés, ne tiennent plus sur leur jambes, ils ont du mal à relever la tête. C’est beau à chialer. Toujours plus cotonneux, “A Track And a Train” sonne comme échappé des neurones velvetiennes d’un Dean Wareham (Luna). On s’arrêtera là car on déteste jouer à ce jeu du «calqué-collé», surtout que nos jeunes pouces ne méritent pas un tel procès pour leur baptême du feu.

Si quelques sons de casseroles perturbent un peu l’écoute, les fiévreux Shout Out Louds ont tout de même signé l’un des albums de rock les plus attachants de cette rentrée. Compte tenu de l’ancienneté du disque, il est certain qu’une suite devrait être donnée d’ici peu. Ces mauvais tics devraient être corrigées très facilement.

– Ecouter « The Comeback » (stream Windows Media)
-Le site officiel de Shout Out Louds