Lancé par l’époustouflant Everything All The Time, le génial Ben Bridwell signe un second album à l’humeur plus « countrysante » avec encore quelques sidérantes envolées mélodiques.


Il s’en est fallu de peu que la chevauchée fantastique de Ben Bridwell ne passe pas l’année 2006. Lorsque le bassiste Matt Brooke s’en est parti former Grand Archives l’année dernière, quatre mois seulement après la sortie de leur premier album Everything All The Time, l’avenir du groupe semblait un temps compromis : Ben Bridwell perdait là son second compositeur et un vieux frère d’arme (tous deux étant rescapés des défunts Carissa’s Weird). Et pourtant le doute n’est pas permis : Ben Bridwell est incontestablement avec sa voix incandescente le moteur essentiel de Band Of Horses et l’artisan des frondes mélodiques les plus belles. Et c’est peu dire que nous attendions une suite à cette prodigieuse entrée en la matière… Everything All The Time est ce qui est arrivé de plus flamboyant depuis Funeral d’Arcade Fire. D’ailleurs, celui-ci contenait aussi son “The Funeral”, grandiose messe rock totalement habitée par la tragédie. Avec ce petit miracle de chanson, Band Of Horses signait pour la postérité dans le prestigieux livre d’or de la pop.

Bel et bien revenu avec Cease to Begin le bien nommé, la bande de chevaux compte maintenant un line-up entièrement remanié. Il ne reste pour ainsi dire des débuts que le producteur Phil Ek (The Shins), c’est dire… Mais même si le multi-instrumentiste Ben Bridwell à fait le grand ménage au sein de son écurie, Cease to Begin s’inscrit dans la continuité d’Everything All The Time : une collection de chansons limpides, très mélodiques et foulant de grands espaces pastoraux. Ceux qui cherchent le nouveau “The Funeral”, trouveront d’emblée de quoi satisfaire leur soif d’hymne exalté avec le grandiose “Is There a Ghost”.
Sur ces trois minutes intenses qui vont crescendo, le chant haut perché de Bridwell répète inlassablement la même phrase tout le long « I could sleep/when I lived alone, Is there a ghost in my house ? ». Dès lors, nous en rêvons toutes les nuits de cette ombre obsédante. Passé « le » moment de bravoure rock du disque et les deux belles cavalcades électriques suivantes (“Ode to LRC”, “No One’s Gonna Love You”), nos cavaliers instillent dans leurs chansons une couleur country plus prononcée que par le passé. Une country/folk onirique, presque contemplative parfois, traversée d’apparitions de piano spectrales et bien sûr soulevée par cette reverb céleste qui plante sur orbite la voix aigue et inouïe de Ben Bridwell.

Si l’on devait désigner un parrain légitime, ce serait assurément le Neil Young bucolique que l’on retrouve sur le contemplatif Harvest Moon (ici l’aurore “Window Blues”). Sur “Marry Song”, Bridwell fait des infidélités à sa bande pour rejoindre celle du Loner, en incarnant à lui seul la cathédrale d’harmonies vocales Crosby, Stills, Nash & Young. Désormais plus serein, c’est un groupe enjoué qui nous apparaît sur l’excentrique “The General Specific” avec ses clappements de main. Il faudra attendre l’avant dernière plage “Cigarettes, Wedding Bands” pour que Band Of Horses invoque à nouveau sa vaillance, enfourchant des arpèges saturés dramaturgiques et des refrains désinvoltes. Cet état passionnel en devient presque mystique sur “Islands on the Coast”.

La ration de frissons rock pourrait paraître légèrement plus maigre que sur Everything All The Time, mais il faut considérer la chose autrement : Cease to Begin se pose comme un disque d’évasion, à embarquer l’été prochain lors de notre prochaine virée à la montagne pour contempler la lune au bord du lac – comme suggéré sur cette superbe couverture. Finalement, Band Of Horses n’a pas son pareil pour convoquer les grands espaces. Et Ben Bridwell est l’étalon sauvage de ces terres…

– Le site de Band Of Horses