A 62 ans, Neil Young montre qu’il sait toujours faire ce qu’il a toujours fait, soit du folk, du rock et des miracles.


Chrome Dreams II… Pourquoi « II » puisqu’y a pas de « I » ? Parce que le « I » en question, prévu dans les années 70, n’est jamais sorti, ses chansons (magnifiques pour la plupart) finissant disséminées dans les albums suivants. Simple clin d’oeil aux fans endurcis ou plus que ça ? Difficile à dire et en fait on s’en fout un peu. Reste que sur ce « deuxième épisode », on retrouve un peu tout ce qui a fait Neil Young, du folk, de la country, des grosses guitares, des soli un peu chiants d’un quart d’heure et même, parfois, de la grâce.

Agréable morceau d’ouverture, “Beautiful Bluebird” renoue de manière un peu trop visible avec le country-rock moelleux de Harvest (“Out On The Week-End” surtout). La suite sera plutôt hétéroclite, qui verra Neil Young réenfourcher son vieux cheval fou (sans les musiciens de Crazy Horse qui doivent l’avoir mauvaise) ou encore renouer avec sa manière de la fin des années 80 quand, revenu en forme, il dressait de vastes tableaux politico-sociaux au travers de récits choraux à la Dos Passos (le très long mais réussi “Ordinary People”, bien connu des bootleggers). Entre temps, il nous aura rappelé son amour pour la soul de chez Stax (“The Believer”, mignon tout plein), ou servi de jolies ballades country (“Even after”).

Tout ça ne fait certainement pas un chef-d’oeuvre, mais tout de même un album digne et raisonnablement inspiré de la part d’un artiste qui a fini par vieillir malgré ce que laissaient croire des années 90 pétaradantes.

Mais attendez quand même encore un peu… Neil Young, c’est un songwriter old school : comme Dylan, il dégaine sa plus belle cartouche à la fin (Bobby a d’ailleurs – presque – sauvé pas mal d’albums pourris des années 80 en les concluant par des chansons renversantes – écoutez par exemple “Every Grain Of Sand” ou “Dark Eyes” sur Shot Of Love en 1981 et Empire Burlesque en 1985). Et là, en l’occurrence, c’est d’une balle en argent qu’il s’agit. “The Way”, qui conclut l’album, semble baigner dans la même lumière pâle et lointaine qu’After the goldrush (1970). La voix de vieil enfant Neil Young s’y mêle à celles d’autres enfants. Ils «viennent nous chercher» chantent-ils, et même si on est perdus, ils connaissent le chemin qui nous ramènera chez nous, là où on trouvera la paix…
Ne riez pas, c’est très beau, comme suspendu dans les airs et pendant quelques minutes on n’ose pas faire un bruit. La grâce en somme.

– Le site officiel de Neil Young