On a déjà beaucoup écrit sur le picking, tout en plénitude, du bostonien Glenn Jones, et les bienfaits apaisant que sa six-cordes acoustique peut nous procurer.


On a déjà beaucoup écrit sur le picking, tout en plénitude, du bostonien Glenn Jones, et les bienfaits apaisant que sa six-cordes acoustique peut nous procurer. Sur ces trois premiers albums solos, l’ex guitariste du groupe post-rock Cul de Sac s’inscrivait dans la grande tradition des parrains folk primitifs américains, soit la sainte trinité John Fahey, Robbie Basho et Leo Kottke. Avec My garden State, l’artisan aux mains d’or reste fidèle à ses pérégrinations folk en solitaire : huit compositions instrumentales alternant entre banjo (deux compositions ici) et six-cordes. En creux de ses arpèges clairs et intelligibles, il se teinte sur ce quatrième volume un caractère introspectif qui tranche avec ses disques précédents. Le contexte est en effet particulier : les morceaux ont été composés dans sa maison familiale du New Jersey où Jones a grandi, alors qu’il s’occupait de sa mère malade, atteinte d’Alzheimer. La plupart des titres du disque se réfèrent ainsi à des lieux familiers de son enfance, tel le beau et nostalgique « Bergen County Farewell ». La multi-instrumentiste et ingénieur Laura Baird – la soeur de la musicienne Meg (membre d’Espers), avec qui elles forment le duo folk The Baird Sisters – l’assiste techniquement et l’accompagne même au banjo à quelques occasions, notamment lors du final de « Going Back to East Montgomery », magnifique folk song élégiaque de huit minutes. A mi-parcours de l’album, le disciple du label Takoma signe deux de ses compositions les plus bouleversantes : « The Vernal Pool » d’abord, un blues/raga inhabituellement lent lorsqu’on connait le dextérité du maître, mais qui prend progressivement un tour inquiété, affolé jusqu’à en étourdir nos sens. Et puis surtout, « Alcouer Gardens », où introduit par le son de la pluie et du tonnerre grondant, le vétéran nous raconte une histoire sans paroles, installé sur un patio grinçant qu’on imagine donnant sur un immense champ de coton. Une émouvante pensée sur le cycle de la vie, sur le temps qui passe inexorablement. Avec l’âge, ce n’est plus la beauté de l’instrument qui transparaît, mais la belle âme de cet homme humble. En attendant de le retrouver son nouveau projet qui s’annonce détonnant, enregistré en configuration trio avec le batteur Chris Corsano (Six Organs of Admittance) et l’artiste/monologuiste David Greenberger de The Duplex Planet.