Attendu comme le messie à travers toute la galaxie rock mondiale, le quatrième album des White Stripes ne déçoit pas. Au contraire, il assomme de son poids la concurrence sur un double album prodigieux, qui prouve que l’on peut faire la meilleure musique du monde avec trois fois rien.
On aura entendu toutes les rumeurs sur ce faux-couple familiale, devenu en l’espace de deux ans un des incontournables de la scène rock mondiale. Avec leurs accoutrements tout droit sortis d’un cartoon et leur formule rudimentaire sans concession, les White Stripes sont devenus « LES » chouchous de la presse spécialisée internationale : Mojo, NME, Rolling Stones, Rock n’ Folk, tous leur font des courbettes… Comment un duo aussi élémentaire a-t-il pu mettre d’accord tout le monde? Certains big-band rocks en manque de reconnaissance artistique doivent ruminer dans leur coin face à un tel phénomène…
Outre les théories cycliques maintes fois énoncées sur le retour du rock tous les dix ans, on peut s’avancer sans peine en disant que le duo White Stripes et son rock spontané, dénué de tous superflus (si ce n’est une bonne dose d’énergie), a sérieusement contribué avec les strokes and co à redonner un coup de fouet à la scène rock garage, plutôt méconnu par le mainstream. Jack White est d’ailleurs conscient de l’importance médiatique du groupe et avouait récemment dans le mensuel britannique Mojo vouloir en finir avec le duo le plus vite possible avant qu’ils n’en reste plus qu’une énorme machine commerciale. Bluff ou pas, l’infos est à surveiller de près.
A l’instar des Hives, les White Stripes, peuvent se targuer d’avoir un peu de crédit derrière leur carrière. Contrairement aux Strokes qui passent toujours pour des gamins (doués, faut pas faire la fine bouche non plus) ayant empoché du premier coup, les White Stripes ont sagement attendu leur heure. Chaque album du groupe les a un peu plus rapproché de la reconnaissance jusqu’au troisième album White Blood Cells. Autre gage d’intérêt, ce groupe se contrefiche des lois marketing et entend créer sa musique selon ses propres critères. Pour leur nouvel album, le groupe continue d’explorer de nouveaux horizons pop : Elephant en fait le digne successeur de White Blood Cells. Enregistré en 3 semaines dans un studio londonien au printemps dernier, cette nouvelle galette respire la spontanéité et le plaisir des oreilles.
Ce qui est marrant avec les White Stripes, c’est qu’on se dit que leur formule restreinte – forcément répétitive – à deux instruments, va finir par nous agacer au bout d’un moment. Et bien on a encore tout faux. Si la spontanéité est toujours le maître mot, Jack White est assez futé pour ne jamais être redondant avec sa guitare. Nous avons affaire certainement à l’un des guitaristes les plus inventifs actuellement sur le circuit.
DECORTIQUONS TOUT CA :
Elephant respire donc l’éclectisme. On sent que le groupe se fait plaisir (et nous aussi !) tout au long des quatorze titres de ce mastodonte rock.
Dans la vieille tradition du rock, tout bon album qui se respecte se doit d’ouvrir les hostilités avec deux brûlots rock ravageurs (se référer aux bibles Led Zep 4, Pleased to Meet Me, Raw Power…). Elephant n’y fait pas exception, « Seven Nation Army » avec sa délicieuse mélodie à la basse est une ouverture en règle et démontre d’entrée que le groupe ne s’est pas boursouflée malgré les étoiles du star system. « Black Math », le titre suivant est encore supérieur et possède un des chorus de guitare les plus efficaces entendus de longue date. Plus, loin une très belle reprise/surprise « I Just Don’t Know What To Do With Myself » de Sir Burt Baccharach, un grain plus énervée (duo oblige) et certainement l’un des grand moments de cet album qui en comporte une sacrée quantité.
Pour la première fois, Meg délaisse son kit rythmique pour chanter sur un titre, « In The Cold, Cold Night », petit blues atmosphérique accompagné d’un orgue et une guitare. Le piano fait une apparition sur « I Want To Be The Boy ». « You’ve Got Her In Your Pocket » est une superbe ballade acoustique comme Mc Cartney savait en faire il y a bien longtemps. Un rien conventionnel le blues rock « Ball And Biscuit » s’étire sur plus de sept minutes. Pas le temps de bailler, la paire enchaîne avec deux titres agités « Little Acorns » (ou l’art de maintenir la tension) et « Hypnotise », deux futurs classiques du duo White n’ Blood.
Pour ne pas faire comme tout le monde, l’album se termine sur une superbe comptine en duo (« It’s True That we Love One Another « ) et s’amuse à faire régner la confusion avec des paroles qui s’interroge sur leur pseudo relation amoureuse et familiale. Un épilogue parfait pour un album génial en somme, qui nous prouve que ce duo poivre et sel a encore beaucoup de chose à dire avant de se dissoudre (espérons-le, le plus tard possible).