Le nouvel album de Damon Albarn et de ses acolytes confirme bien la voie déjà empruntée sur 13 et laissera nostalgique les amateurs de tubes. Mais attention,
disque OVNI et indéniablement d’hors et déjà un des grands rendez-vous musicaux de 2003.
Il ne reste donc plus grandes traces de ce qui a fait la gloire de Blur. Envolées les structures imposées « couplet/chorus/refrain/couplet… », si ce n’est le temps de deux titres rescapés : « Crazy beat » et « We’ve got a file on you ». Ces deux chansons témoignent d’ailleurs toujoursde leur savoir-faire lorsqu’il s’agit de composer des chansons énergiques tendance punkisante comme le furent « Globe alone », « B.L.U.R.E.M.I » et « Chinese bombs ».
Blur s’était déjà délibérément remis en cause sur son album éponyme, sans parler de la pirouette artistique de 13 où les ambiances torturées -via moult sonorités électroniques– se taillaient la part du chef, mais ce qui à l’époque laissait présager de nouvelles directions musicales (samples, guitares saturées) ne trouve aucun écho sur Think tank, à part le désir de (se) surprendre et tout remettre à plat pour mieux reconstruire ensuite.
C’est un peu comme si le groupe avait enlevé la couche de gras, le clinquant et le tape à l’oeil qui caractérisaient la majorité des morceaux avant 1997, pour ne garder que les pépites de leur inspiration, au risque de donner l’impression de chansons inachevées. Mais loin d’être inachevés, les titres de Think tank regorgent de trouvailles sonores et d’harmoniques placées ça et là. Plutôt que de faire tourner un ou deux riffs et un refrain, le groupe se plait à explorer un thème, à l’enrichir.
N’importe quel auditeur averti tombera certainement des nues à la première écoute de « Gene by gene », « Morrocan peoples… » et « Jets » qui contiennent pourtant bon nombre d’innovations et prévoient d’en faire suer plus d’un(e) en concert.
Puisant dans ses expériences les plus diverses et opposées – l’electro pop de Gorillaz ou la musique traditionnelle africaine de Mali Music- Damon Albarn insuffle de nouveaux sons, une couleur musicale inattendue aux morceaux de « Think tank ». Suite au départ de Graham Coxon, guitariste compositeur, alter-ego de Damon au sein du groupe mais aussi pièce centrale du renouveau depuis l’album Blur, le chanteur se retrouve seul aux commandes toujours accompagné d’Alex James (Basse) et de Dave Rowntree (Batterie) et nous (re)fait le coup de la révolution de Blur.
Chacun des nouveaux morceaux fourmillent de petits assemblages sonores surprenants, de mélodies aux charmes cachés (« Good song », « On the way to the club ») et de rythmes à la fois hypnotiques et dansant (« Out of time », « Brothers and sisters ») qui donnent à l’album un côté « frais » et sincère… Prenez garde, après plusieurs écoutes, il est quasiment impossible de s’en passer ! Plus de « Girls & Boys », ni de « Song 2 » à l’horizon, mais le trio peut se targuer d’avoir signé (au moins) deux nouveaux CLASSIQUES : « Out of time » et « Sweet song ».
Blur est un groupe qui a appris à se mettre en danger pour sortir (et réussir) un album inventif, loin, très loin des sentiers battus au risque de perdre les fans de la première heure, ce sont les -pseudo intellos- rock critics qui vont être aux anges ! Mais plus important que le respect du milieu musical, le laboratoire Think Tank risque fort de séduire une bonne partie de la planète… jusqu’à leur prochaine révolution.