Nouveau label et nouvelles ambitions pour les copines de Bright Eyes, détentrices de mélodies baroques foudroyantes de beauté. Attention, il est très facile de tomber amoureux de ce trop plein d’émotion. On vous aura prévenu.
A la vitesse d’un album par an, Orenda Fink et Maria taylor construisent une oeuvre atypique, un paysage où la sensibilité féminine prend une place considérable. Depuis leur premier album éponyme paru en 2001 à Burn and Shiver sorti l’année suivante, Azure Ray démontre à chaque étape une fqculté de progression et une qualité d’écriture tout bonnement remarquable.
Ce duo originaire d’Athens, nous transporte vers une mélancolie pop teintée de cathédrales gothiques, emportée par des cordes de violons ayant le chic pour nous filer le spleen.
Et si leur aura d’artiste est en France plutôt confinée à une poignée de fans, leur renommée au sein de la communauté artistique est déjà grande et respectée (les deux jolies brunes ont ainsi prêté leurs voix sur le dernier album du déraillé Moby).
Au vu de leurs postes réguliers au sein des albums de Bright Eyes, il n’était étonnant de voir nos jeunes donzelles signées sur le label du jeune prodige Connor Oberst, chef de file du label Saddle Creek. Un rendez-vous que l’on savait inévitable à la longue. Début 2002, le duo est donc signé chez Saddle Creek et inaugure son entrée en publiant le November EP, une collection de six titres à la beauté troublante, démontrant le savoir-faire grandissant de cette paire féminine. Aujourd’hui, Hold on Love troisième album et donc premier pour le petit label du Nebraska relève encore une fois le pari de faire mieux et s’y attèle sans problème.
Comme il est souvent de rigueur maintenant dans le monde de la musique, Eric Bachmann, producteur attitré du groupe sur les albums précédents, fait appel à d’autres prestataires pour apporter des idées fraîches. Deux noms en l’occurrence sont sortis du lot : Andy Lemaster (un touche à tout de génie chez Bright Eyes qui multiplie généralement les casquettes de musicien, producteur et ingénieur) et Mike Mogis, (remarqué toujours chez Bright Eyes, mais aussi The Faint, Arab Strap).
Avec l’appoint de ces jeunes loups de la production, les chansons d’Azure Ray ont gagné en profondeur sonore mais ne perdent pas le change en émotion. Les ambiances gothiques sont toujours là, un piano noyé de réverbe nous renvoie sur ces mélodies de sirène toujours plus singulières.
« The Devil’s Feet », titre d’ouverture, débute sur un thème au piano accompagné de quelques boucles électros sobres, procurant à l’ensemble une nature mystérieuse et troublante. Toujours accompagnés d’une section de cordes, ces arrangements subtils sont développés tout au long de l’album, mais ne font pas non plus dans la démesure : leur rôle est là pour accompagner les mélodies et surtout ces deux voix qui ne font qu’une.
Car Orenda Fink et Maria Taylor possèdent des harmonies vocales très basses, et de ce fait, il est assez dur de reconnaître le chant l’une de l’autre. Mais cette spécificité vocale fait aussi la clé de voûte dramatique du groupe, procurant une intensité à leurs compositions tout à fait hors du temps. Difficile de ne pas penser aux voix hypnotiques de Lisa Gerrard et Liz Frazer à l’écoute de « Sea of Doubts », pour ne citer qu’un exemple.
Les paroles racontent toujours des histoires surréelles dont la thématique générale nous renvoie à des sujets finalement communs : des histoires d’amours qui tournent mal. Ce côté lyrique un peu baroque voire folklorique qui pourrait paraître pompier à première vue (et dont d’habitude je ne suis pas du tout friand il faut l’avouer) fonctionne à merveille dans ce cas de figure. Les textes très bien tournés des demoiselles y étant certainement pour beaucoup. Il faut dire qu’avec un parolier de la trempe de Connor Oberst, la concurrence doit être rude et motivante chez Saddle Creek.
Enfin, s’il ne fallait écouter qu’un seul morceau de Hold on Love (et ce serait bien dommage tout de même), laissez-vous entraîner par la délicatesse d' »If You Fall », jolie pop songs tout en nuance qui se dévoile écoute après écoute, et rappelle au loin la mélancolie des Smiths période Queen is Dead. On se met alors à s’identifier à Ulysse et, tout comme lui, on réalise que toute résistance à ces chants de sirène restera veine.
-Le site officiel d’Azure ray
-Quelques morceaux sont en écoute sur le site de Saddle Creek