David Byrne, le touche-à-tout « mondialiste » du rock alternatif, nous livre ici un album atypique mêlant jazz et classique. Un voyage vers les highlands ecossaises, créé spécialement pour la bande originale du film Young Adam.


Pour son déjà huitième disque en solo, David Byrne est revenu sur son lieu de naissance, l’Ecosse, pour composer la musique du film de David Mac Kenzie Young Adam. Il faut savoir que cet éternel baroudeur avait déjà écrit pour le cinéma, et avait même reçu des récompenses (Golden Globe, Academy Award), pour le film Le Dernier Empereur, de Bernardo Bertolucci, musique qu’il avait composé avec Ryuichi Sakamoto et Cong Su. Ce sont les producteurs de ce dernier qui sont venus lui demander de composer la musique du film, basé sur le roman de l’écrivain écossais Alexander Trocchi.

Notre écossais n’est pas seulement connu pour avoir été le frontman de l’un des groupes les plus influents de la scène alternative new-yorkaise, les Talking Heads, mais aussi pour sa très grande curiosité artistique, autant dans les différents genres musicaux (rock, funk, salsa, samba, classique) que dans différents domaines (réalisateur de vidéo-clips et de films, photographie, design). En 1988 il a créé, à l’instar de Peter Gabriel, le label Luaka Bop qui abrite des artistes aussi variés que Susana Baca, Cornershop ou Zap Mama.

Pour Lead Us Not Into Temptation, seuls des artistes écossais ont été recrutés, pressentis comme étant mieux à même d’exprimer leur région. Mis à part les nombreux musiciens de Glasgow qui jouent la partie classique sur ce disque, nous retrouvons des membres de Mogwai, des Delgados, d’Appendix Out et de Belle & Sebastian, dont le point commun, vous l’aurez compris, est d’être écossais.

Le résultat est à la hauteur de la rigueur avec laquelle ce disque a été préparé et enregistré. On vogue d’une ambiance à une autre, et il est inutile de préciser qu’on se sent bien à l’écoute de cette BO : un peu de suspense par ici et de mélodrame par là. Nous passons de titres très classiques à d’autres plus jazzy, et l’alternance ne choque vraiment pas. Bien au contraire, elle finit même par se mélanger harmonieusement.

Trois types d’ambiance sont proposés ici, mis à part le titre exclusivement jazz du Hung Drawn Quartet, « Haitian Fight Song « :

-Tout d’abord, un mélange de jazz et de musique classique, très proche de ce qu’ont déjà fait les Tindersticks(comme « Warm Sheets ») pour les films de Claire Denis (Nénette et Boni par exemple). A savoir des mélodies languissantes, parfois teintées de nostalgie, apportées par un piano sur des rythmes soupirés par une batterie de jazz et une contrebasse, et caressées par des plages de violons très lyriques comme sur « Seaside Smokes ».

-Ensuite, des titres plus proches du classique ‘cinématographique’, celui qui se fonde sur les images, voire bien souvent qui se crée par l’image. Du coup, les changements de rythmes sur le même titre sont ici légion, et l’on passe subitement d’une ambiance à l’autre. Ces titres sont plus angoissants aussi, et on devine les images à défaut de pouvoir les visionner, comme sur « Mnemonic Discordance » ou « Inexorable » .

Enfin, « Speechless » et « The Great Western Road » sont les deux seuls morceaux chantés. Il s’agit bien évidement de David Byrne himself qui chante, et ses mérites dans ce domaine ne sont plus à faire. Il n’est pas désagréable de l’entendre chanter de manière très inspirée, dans un registre qui n’est pas le sien, à savoir des orchestrations proches du classique d’un John Cage.

Le site de David Byrne