Sombre et envoûtant, le sixième album de Windsor For The Derby, We Fight Til Death, conjugue habilement post-punk et pop sautillante. Brillant.
We Fight Til Death. Le parcours sinueux de Windsor For The Derby a en effet tout du combattant. Sixième album en une décennie, We Fight Til Death est en réalité le cinquième album studio du groupe partagé entre Austin et Philadelphie. Si leurs deux premiers albums, Calm Hades Float et Minnie Greunzfeldt, furent hébergés chez Trance Syndicate Records, Windsor For The Derby sera par la suite habitué au changement de labels. Difference & Repetition atterrira sur celui de l’ex Swan, Michael Gira Young Gods Records tandis que Emotional Rescue trouvera place chez Aesthetics. Après une compilation d’inédits et autres face B parue chez Emperor Jones (Ernest Powers) en 2002, Windsor For The Derby trouve aujourd’hui refuge aux cotés d’Early Day Miners, Scout Niblett et autres Songs :Ohia au sein de Secretly Canadian avec ce sixième opus qui n’a rien d’une sucrerie malgré sa pochette guimauve.
Le rose bonbon n’a en effet jamais été aussi sombre. D’entrée, Windsor For The Derby impose une esthétique double avec cet oiseau mort sur fond rose pétant. Cette pochette cristallise pourtant magnifiquement la musique des Texans. D’un coté une atmosphère tendue, sombre, héritière de Joy Division, Gang Of Four et autres groupes aux guitares blanches de l’after punk. De l’autre un coté pop qui ne cesse de s’accentuer depuis leur premier album. Car à ses débuts, c’est dans le post rock qu’officiait Windsor For The Derby. Aujourd’hui, véritable entité mutante, la musique de Dan Matz et Jason Mcneely brasse une flopée d’influences digérées et changent de trottoir d’album en album.
Si Emotional Rescue oeuvrait ainsi dans un folk slowcore intimiste, We Fight Til Death convie guitares glacées et rythmiques sautillantes dans une musique en perpétuel mouvement. Si en ouverture, le long « The Melody of a Fallen Tree » enchaîné à « The Cutter » donne l’aperçu d’un folk hybride attachant où rythmique binaire et clavier cheap donne naissance à l’un des morceaux les plus pop et joyeux de Windsor For The Derby, “Nightingale” et “The Door Is Red” renvoient directement au placard la piste de danse fraîchement improvisée dans le salon.
Avec leurs guitares acides et leur basse profonde, les ombres de la new wave et de l’after punk rodent derrière la porte. Windsor For The Derby se fait alors plus sombre, plus inquiétant, installant des climats tendus qui n’éclatent jamais comme pour mieux signifier leurs écrasantes présences. La batterie se fait sèche et les motifs sonores se répètent. “Black Coats”, tout en légèreté et riffs imparables, séduit par son immédiateté tandis que “For People Unknow” rend visite à Ian Curtis comme l’éponyme We Fight Til Death qui semble marqué à jamais par l’intro de “Love Will Tear Us Apart”. On est alors loin de la douceur tranquille qui souffle sur A“ Spring Like Sixty” ou du flottement électro printanier de “Logic And Surprise”.
En fin d’album, les larsens de guitares laissent place à un piano fragile et mélancolique comme pour suggérer que We Fight Til Death n’était que l’instantané du Windsor For The Derby de 2004. Qui peut encore franchir la route et passer sur le trottoir d’en face.
-Le site de Windsor For The Derby