L’Ecossais et sa bande continuent de fondre un folk bucolique et champêtre, au-delà des canons contemporains. Intemporel et vital comme un retour aux sources.


De passage récemment à Paris, nous avons pu vérifier de vive voix (et vue) combien James Yorkston est un type chaleureux. Attendant patiemment le set du solitaire Ray Delamontagne (sa première partie), le folksinger Ecossais discute avec un roadie dans un coin de la salle où est entreposé le merchandising. Du coup, on a un peu de mal à regarder l’étalage, sachant que le bonhomme nous scrute d’un oeil attentif, attendant qu’on lève la tête pour taper un brin de discussion amicale.

James Yorkston est un type entier et accessible, qui reflète assez le tempérament de ses disques, profondément humain. Pourtant, on aimerait bien que le bonhomme soit plus arrogant, voire intouchable, tant les deux albums qu’il a déjà derrière lui sont magistraux, d’une beauté sauvage. D’un autre côté, le musicien d’Edinburgh sait certainement que son public n’est pas du style à l’épier, ni à le poursuivre à la sortie d’un concert. Cet ancien punk reconverti dans le folk pastoral connaît très bien la voie qu’il a emprunté, celle qui ne lui procurera jamais un succès foudroyant, mais dont la carrière s’installera lentement mais certainement, avec un sort in fine certainement plus enviable que celui d’un éphémère groupe de rock.

Pour l’instant, l’Ecossais tourne pour promouvoir son second album, toujours accompagné de ses fidèles Athletes. Sur scène, le bonhomme est généreux, aime blaguer avec l’audience sur sa condition de folksinger tristounet. Assis sur sa chaise durant tout le set, le guitariste/chanteur se révèle très soudé avec ses musiciens : on peut le voir esquisser un sourire lorsqu’un d’eux, taquin, fait une fausse note délibérée. On se sent presque chez soi tant cette ambiance tamisée et un tel sentiment de communion nous couve, un peu comme une vieille couette déchirée dont on n’ose se séparer car on sait qu’aucune autre ne saurait être aussi confortable.

Moving Up Country (2002) était un album de prime abord inoffensif, mais sur lequel on revenait régulièrement et qui finalement s’avèrait d’une longévité insoupçonnée. Deux ans plus tard, cette musique ne semble toujours pas s’essouffler. Just Beyond The River, suit en toute logique cette voie : une musique insensible à l’usure du temps. Enregistré et produit par l’atypique Kieran (Four Tet) Hebden durant une période de deux semaines au Bryn Derwen studios (pays de Galles), ce disque fidèle ne bouleversera donc pas l’environnement préétabli sur le précédent : Yorkston assène des arpèges bucoliques accompagnés par un groupe qui semble jouer dans une grange poussiéreuse. Il y a aussi cette voix qui se laisse traîner, presque désabusée, qui n’est pas loin d’un Will Oldham. Et tout comme l’ancien Palace, ses chansons n’ont pas vraiment de refrain, elles semblent suivre leur chemin, tout comme l’indique le titre de cet album.

Pratiquement aucun instrument n’est amplifié : un piano poussiéreux, un banjo, un accordéon et un violon suffisent à nous transporter vers une pureté que l’on retrouve rarement chez des musiciens contemporains. Parfois, on pense aux Pogues pour cette ambiance de taverne et cette acoustiquen d’une force évocatrice qui se passerait presque de paroles tellement elle parle d’elle-même.

Souvent contemplatif, le folk limite country de Yorkston évoque des paysages silencieux et des valeurs qui lui sont liées, sans jamais tomber dans une caricature écolo babacool. Car Yorkston et sa bande savent capter un moment de lumière privilégié et le faire durer le temps d’une chanson. Devant tant de sagesse et de beauté, on se dit que cet homme du terroir a encore le temps de bouleverser son petit nid douillet.

-Le site officiel de James Yorkston