Les New Pornographers ont trouvé leurs cousins californiens. Une power pop nerveuse qui n’hésite pas à dire bonjour à Lucy dans le ciel avec des étoiles. Une bonne surprise.
Comme le dit si bien le grand philosophe et poète Joël Bats : « L’habit ne fait pas le moine ». L’objet du délit démarre sous l’apparence d’une pop song somme toute gentillette, « Feels Good Being Somebody”, d’où surnage ce refrain ambigu : « I Like Taking Drugs, But I can’t Afford them » ???? On repasse la bande (Number 9, Number 9, Number 9). Oui, c’est bien de cela qu’il s’agit : une « junky song » que ne renierait pas le vilain Anton Newcombe (Brian Jonestown Massacre). Fondamentalement, une mélodie aussi divine ne pourrait véhiculer une telle prose, célébration de la déchéance. A moins que ce soit le plus gros hold-up depuis “Lucy in the Sky with Diamonds”…
Méfiez-vous, les Dios (Malos) sont moins gentils qu’ils n’y paraissent. D’ailleurs, Ronnie James Dio – cette diva du hard rock – leur a collé un procès pour plagiat de patronyme. Déjà sans thunes, le groupe a abdiqué et rajouté « (malos) » à leur intitulé (« mauvais » en espagnol, on y revient donc). Tant mieux, cela les rend tout de suite plus (méchamment) sympathiques.
Basé près de la ville californienne Hawthorne aux abords de L.A, on se doute que vu leur créneau, plus jeunes ils préféraient passer leurs journées à cirer leur planche de surf et manger des glaces plutôt que de se taper de la géométrie. Le fameux triptyque de la côte ouest, « Fun Fun Fun », vous suivez ?
Les deux albums à leur actif sont un pur concentré de pop qui coule comme du miel dans les oreilles, avec un zest de barré qui les rend un peu plus intéressants que la moyenne. Ce second opus éponyme, produit brillamment par le très prisé Phil Ek (The Shins, Built To Spill, Modest Mouse), conquerra sans peine les coeurs des afficionados du genre power pop. Une bêtise gourmande, concoctée avec amour, avec pour ingrédient la fougue des supers New Pornographers et la caboche hallucin(ogen)ée des Super Furry Animals. Du haut de gamme.
On a beau écrire de la pop luxueuse, on peut aussi se permettre quelques disgressions et vouer un certain goût pour l’étrange, comme en atteste l’instrumental biscornu « Tokyo Sunrise ». Bien acidulé également, “Say Anything” est une friandise à ne pas mettre entre toutes les bouches, avec son ambiance de traîneau saupoudré de choeurs sucre glace. Le vocaliste en chef Joel Morales détient l’art malicieux de trousser des refrains abracadabrants, à la manière d’un bon thriller bardé de rebondissements (l’irrésistible “Grrrl”). Une formule fédératrice, mais diablement compliquée à mettre en place. Dans le registre des ballades tournoyantes, “EPK” tourbillonne sur plus de 5 minutes de manège psychédélique, avec un final en apothéose. “Later Skater”, plus péchu, livre toujours une subtile envolée mélancolique. Enfin, le piano foldingue de “I Feel Fine All The Time” nous rappellera au bon souvenir de Ben Folds Five, groovy à souhait.
Dios Malos ne tient pas encore parfaitement sur la longueur, notamment lorsqu’ils bifurquent dans l’exercice de style americana. C’est d’autant plus regrettable que dans ce genre d’exercice, la maladresse se repère plus facilement que chez d’autres. Mais on tient bien là un talent indéniable et avec ça une grosse poignée de morceaux irrésistibles, du calibre d’un Carl Newman. On dit parfois que le bonheur éphèmere est celui qui reste le plus longtemps dans nos mémoires…
-Le site de Dios (Malos)
-Le site du label Full Time Hobby